LA VIE DE JÉSUSde Bruno Dumont, avec David Douche, Marjorie Cottreel, Geneviève Cottreel (1997, France, 96 mn) Bruno Dumont filme la banalité du mal et réussit un beau défi de cinéma : montrer un être raciste avec attention, sans jamais donner de gages à l’ignominie. Pourquoi aime t-on La Vie de Jésus, film peu aimable […]
LA VIE DE JÉSUS
de Bruno Dumont, avec David Douche, Marjorie Cottreel, Geneviève Cottreel (1997, France, 96 mn)
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Bruno Dumont filme la banalité du mal et réussit un beau défi de cinéma : montrer un être raciste avec attention, sans jamais donner de gages à l’ignominie.
Pourquoi aime t-on La Vie de Jésus, film peu aimable ? Peut-être justement parce qu’il est difficile à aimer, parce qu’il tente de nouer avec le spectateur un rapport exigeant. Le cinéaste porte un autre type de regard sur les gens de peu : loin de toute gaudriole et de tout cynisme, il filme avec respect et attention ces hommes qui ne lui ressemblent pas. Filmer l’Autre, grande affaire du cinéma, est la grande affaire de La Vie de Jésus. Son enjeu est là, pas loin de La Promesse des frères Dardenne : filmer l’ennemi en lui donnant une chance, regarder le salaud comme un être humain fait d’un écheveau compliqué d’ambiguïtés plutôt que comme un monstre taillé en bloc. S’approcher de la banalité du mal pour la connaître, éventuellement la comprendre, jamais pour l’excuser. Car
tout le talent de Dumont est de savoir poser
un regard attentif sur des paumés antipathiques, sans les caricaturer, mais sans jamais héroïser leur médiocrité ni les exonérer de l’ignominie de leur acte, ici un crime raciste.
L’autre qualité du film, c’est que sa charge sociale et métaphysique n’écrase jamais le cinéma. Dumont n’oublie pas de filmer le Nord avec une grande précision et un certain talent poétique, inscrivant sur l’écran les alignements de briques rouges et les rues désertes, la campagne humide et les dunes lunaires, les concours de pinsons et les fanfares du dimanche qui se déploient comme de drôles de chenilles pachydermiques
tout un folklore regardé sans folklore.
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