Caméra d’or au dernier Festival de Cannes, l’émouvant portrait d’ouvriers dans un champ de canne à sucre en Colombie.
Ca commence comme dans un vieux western. Un homme plus tout jeune est de retour dans sa maison. C’est Don Alfonso, le mari de Dona Alicia, qui a abandonné sa famille dix-sept ans auparavant. Pourquoi revient-il ? Parce que son fils est très malade.
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Des champs de canne à sucre à perte de vue encerclent désormais la maison. Quand on la brûle, la canne dégage des cendres noires qui sont responsables de la maladie du fils. La femme de ce dernier et Alicia, pour survivre, se font exploiter par ceux-là même qui veulent leur mort. Alors elles coupent de la canne à longueur de journée, sans jamais être sûres d’être payées – scène magnifique où les ouvriers, épuisés après une journée de travail, se relèvent un à un pour aller aider les deux femmes à terminer leur carré. Petit à petit, Alfonso va retrouver l’affection des siens. Mais n’est-il pas déjà trop tard ?
Un chant désespéré et sincère
La Terre et l’Ombre, essentiellement interprété par des non-professionnels, est un film très soigné, cadré, qui ne laisse rien au hasard. On pourrait parfois suspecter César Acevedo d’avoir tout fait, esthétiquement, pour plaire à un jury de festival de cinéma… Mais il s’en dégage une telle sincérité qu’il est impossible de ne pas y voir le chant désespéré d’un Colombien sur les siens. Un chant dont la sincérité, l’extrême sobriété et la beauté faussement sereine désignent sans ambages les crimes sans pitié du libéralisme anonyme.
Présenté à la Semaine de la critique en 2015, La Terre et l’Ombre remporta la Caméra d’or (le prix remis au meilleur premier film toutes sélections confondues). La présidente du jury, Sabine Azéma, eut ce commentaire : “Nous avons vu vingt-six premiers films et nous avons trouvé notre trèfle à quatre feuilles dans un champ de canne à sucre.”
La Terre et l’Ombre (Col., 2015, 1 h 37)
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