Avec “How to Save a Dead Friend”, Marusya Syroechkovskaya expose douze ans d’une vie de rien où le besoin d’échappatoire guide l’intime et les images. Poignant.
En quoi le cinéma sauve-t-il de la mort ? Et l’amour, du mal-être ? Ce sont les questions qui traversent ce premier long métrage documentaire russe réalisé par une jeune femme qui a commencé à se filmer le jour de ses 16 ans, en ayant l’intuition que ce serait sa dernière année, conviction balayée par la rencontre avec Kimi. Le couple va beaucoup se droguer et tenter de se sevrer, essayer de s’évader du quotidien morose de son quartier pauvre, et s’aimer surtout.
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La caméra de Marusya documente leur vie pendant douze ans, jusqu’à la mort de Kimi qui ouvre le film, car à mesure qu’elle trouve dans la pratique journalière du cinéma une échappatoire à sa mélancolie, lui s’y enfonce de plus en plus.
Cette œuvre dit à quel point il est à la fois intense et impossible de s’aimer quand on va mal
Mix réussi d’Harmony Korine, de Jonathan Caouette et de Trainspotting, How to Save a Dead Friend est une fenêtre sur une jeunesse russe marquée du double sceau de la dépression et de la répression. Mais c’est aussi un saut en soi-même. Le film reconnecte au résidu d’emo phase qui subsiste en soi, saisit à la volée le décor d’une chambre d’ado dans les années 2000 : des CD pirates de Nirvana glissés dans un Discman, un poster défraîchi de Kurt Cobain, les débuts pixélisés d’internet, un téléphone à clapet…
Bouleversante, cette œuvre sépulcrale dit à quel point il est à la fois intense et impossible de s’aimer quand on va mal, et comment les images peuvent être une façon de s’émanciper de l’autre tout en le rendant immortel.
How to Save a Dead Friend de Marusya Syroechkovskaya (Rus., 2022, 1 h 43). En salle le 28 juin.
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