Excellente initiative que cette réédition de La Question, au moment où le lourd dossier de la torture en Algérie est enfin examiné au grand jour. Seul film français consacré au sujet, puisque La Bataille d’Alger (Gillo Pontecorvo, 1966) était un film italien, La Question est d’abord une très exacte et très minutieuse adaptation du témoignage […]
Excellente initiative que cette réédition de La Question, au moment où le lourd dossier de la torture en Algérie est enfin examiné au grand jour. Seul film français consacré au sujet, puisque La Bataille d’Alger (Gillo Pontecorvo, 1966) était un film italien, La Question est d’abord une très exacte et très minutieuse adaptation du témoignage d’Henri Alleg, le directeur communiste du journal Alger Républicain, publié aux Editions de Minuit par Jérôme Lindon, puis interdit, avant d’être largement diffusé sous le manteau. Devant l’impossibilité légale de citer le nom des tortionnaires parachutistes, Heynemann et son scénariste Claude Veillot avaient changé les noms des victimes. Devenu Charleg, comme Maurice Audin (mort étranglé par ses persécuteurs durant sa captivité à la tristement célèbre Villa Sésini) devenait Oudinot, Alleg est présenté comme un homme de convictions et non comme un héros monolithique. Ce refus de la mythification est la première qualité du film d’Heynemann. L’absence de trop de sentimentalisme, au profit d’une somme de faits et de gestes, de la description minutieuse d’une organisation oppressive et des maigres voies de recours pour la combattre (voir le rôle de Teitgen, secrétaire général de la police d’Alger, ancien déporté lucide sur les méthodes de l’armée) est la seconde. Premier film de son auteur, La Question souffre d’un évident déficit de stylisation (les tortionnaires sont particulièrement mal figurés, de façon trop folklorique) et d’une certaine maladresse de découpage qui le rapproche trop souvent du téléfilm à sujet. Au compte-rendu précis du livre d’Alleg répond un juste équilibre entre ce qui est montré et seulement suggéré, sans que la vigueur de la dénonciation en soit amoindrie. Parfois laborieux, souvent incapable d’être à la hauteur de l’importance de son sujet, La Question n’en reste pas moins un film foncièrement honnête, un film digne à propos de l’une de nos plus grandes indignités nationales.
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