Après un automne 98 prospère, où les feuillets relatifs à la Nouvelle Vague chutèrent dru, ce printemps-ci est venu fermer le bal commémoratif avec une riche sélection d’articles publiés dans les années 60 aux Cahiers du cinéma, la célébrissime maison mère qui fit, sous l’influence spirituelle d’André Bazin, accoucher non pas, comme le remarque très […]
Après un automne 98 prospère, où les feuillets relatifs à la Nouvelle Vague chutèrent dru, ce printemps-ci est venu fermer le bal commémoratif avec une riche sélection d’articles publiés dans les années 60 aux Cahiers du cinéma, la célébrissime maison mère qui fit, sous l’influence spirituelle d’André Bazin, accoucher non pas, comme le remarque très justement André S. Labarthe dans un stimulant entretien inédit placé en exergue, « le mouvement qu’on a dit, mais un ensemble d’exceptions ». Il serait très dommage de ne voir en ce petit livre rouge et noir qu’un simple et dispensable additif au fort volume de Jean Douchet quand, selon nous, il en constitue bien plutôt un nécessaire codicille.
A l’heure où le cinéma hexagonal crève plus que jamais sous les fausses légendes, des garants officiels de l’infecte « qualité française » (Wargnier, Berri, Annaud) aux professionnels de la subversion (Blier, Dupontel, Kassovitz), La Nouvelle Vague allume de précieux contre-feux et nous replonge in vivo dans le tourbillon de la vie cinéphilique d’alors, en plein coeur de ce crucial instant de vérité qui ébranla rudement un système de production archaïque et sclérosant, lequel parvint néanmoins à surmonter l’épreuve de force pour mieux reconsolider ses positions.
Ne lésinant pas sur les bonheurs de lecture, La Nouvelle Vague se compose à la fois de cinq conversations passionnées, toutes éclairantes, avec d’anciens moteurs de la revue passés du stylo-caméra à la caméra-stylo, et d’écrits critiques, parmi lesquels on distinguera celui, splendide, de Claude Beylie sur Le Signe du lion de Rohmer et celui, perçant et goguenard, de Luc Moullet consacré à Jean-Luc Godard au moment de la sortie d’A bout de souffle.
Vive incitation à l’aiguisement du regard critique, ce recueil aurait valablement pu porter comme sous-titre La Traversée des apparences, dessein que Douchet identifia chez le Chabrol du Beau Serge et que l’on peut à bon droit étendre à toute la Nouvelle Vague et, encore au-delà, au cinéma moderne dans son entier ainsi qu’à sa critique du moins quand celle-ci n’est pas l’oeuvre de plumitifs constipés, pour reprendre l’une des jubilatoires formules de Moullet.
Aucune crainte à avoir : de tels nuisibles individus ne traîne pas l’ombre d’une demi-chiure avortée à l’intérieur de La Nouvelle Vague.
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