Le festival de cinéma italien fait face à une crise de fonctionnement mais aussi d’identité artistique.
Dans un trou, chacun met ce qu’il veut. On ne sait trop ce que symbolise celui qui ravage la Mostra de Venise, un trou au sol monstrueux masqué sommairement par des bâches blanches. La crise de toute politique culturelle en Italie ? La fin de toute considération pour l’art cinématographique ?
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Au départ, ce trou marquait le coup d’envoi de travaux pharaoniques pour édifier un palais du cinéma sur le Lido, censé remplacer avantageusement l’infrastructure un peu défraîchie du plus ancien des grands festivals de cinéma d’Europe. Mais après deux ans de travaux, tout est au point mort– 37 millions d’euros ont déjà été carbonisés dans ce trou. C’est donc dans les installations anciennes que se tient à nouveau la Mostra, même si la circulation y est sérieusement perturbée par ce cadavre de chantier – sorties de secours aménagées en entrée principale, etc. Certaines structures ont même été rénovées, puisque c’est désormais encore sur elles qu’il faudra compter dans les prochaines années.
On ne pourra pas compter en revanche sur Marco Muller, le sélectionneur et directeur de la manifestation, dont le second mandat arrive à son terme (mais une prolongation surprise n’est toutefois pas exclue). Pendant huit ans, Muller a tenu le festival à bout de bras, en dépit de la concurrence de plus en plus féroce du festival de Toronto et d’un budget rétréci. Au coeur de son double mandat, il est même parvenu à rivaliser avec Cannes, dans les glorieuses années 2006 (Still Life, Inland Empire…) et 2007 (La Graine et le Mulet, A bord du Darjeeling Limited…).
Excitante sur le papier, alliant grandes signatures (Polanski, Garrel, Cronenberg…) et stars à la présence événementielle (Clooney, Winslet, Madonna, Matt Damon, Jodie Foster…), la sélection 2011 produit pour l’instant des déceptions en chaîne. David Cronenberg réalise un film étonnamment classique, presque plat, sur la rivalité entre Freud et Jung (A Dangerous Method), Polanski revient avec un film très en-dessous de The Ghostwriter, Steve McQueen, après The Hunger, livre une étude de l’addiction sexuelle puritaine et empesée (Shame, où s’illustre néanmoins le magnétique Michael Fassbender).
Le film le mieux accueilli par la presse internationale (selon le tableau de cotations du magazine Variety) serait La Marche du pouvoir de George Clooney, une satire de l’ambition politique pourtant assez convenue. Et le plus mal noté est justement celui qu’on préfère, le seul à ne pas nous avoir déçus, Un été brûlant de Philippe Garrel.
Dans les jours qui viennent vont se succéder les films d’Abel Ferrara, William Friedkin, Alexandre Sokourov. On compte sur eux pour redynamiser un festival qui n’a plus que le prestige cinéphilique pour bras armé et semble cette année, même de ce point de vue, un peu démuni.
Jean-Marc Lalanne
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