Mis en lumière par la prestigieuse A24, le premier long métrage de Danny et Michael Philippou aurait gagné à rester dans l’ombre des catalogues de plateformes de streaming.
C’aurait pu être une petite production horrifique calibrée pour la VoD, comme il en pullule sur les plateformes de streaming. Mais son passage au marché du film cannois, sa sélection à Sundance et son rachat par A24 ont changé le destin de La Main, premier long métrage de Danny et Michael Philippou, duo de cinéastes australiens notamment connu pour sa chaîne YouTube. C’est que la très hype société de production et de distribution américaine, encore auréolée de sa razzia aux Oscars pour Everything Everywhere All at Once et versée dans l’elevated horror, s’est forgée une réputation de défricheuse, révélant notamment Ari Aster (Hérédité) et Robert Eggers (The Witch).
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Vu et revu
Loin de l’ambition des films sus-cités, La Main n’est finalement qu’un petit film d’horreur insignifiant, pas inintéressant dans ce qu’il tente de raconter, mais confondant de bêtise dans son exécution. On y suit Mia, jeune femme endeuillée par la mort de sa mère, qui vit chez sa meilleure amie Jade, et son petit frère Riley. Alerté·es sur les réseaux sociaux par une mode devenue virale dans leur banlieue pavillonnaire, les trois jeunes gens participent à une séance de spiritisme étonnante, consistant à tenir une mystérieuse main en plâtre aux propriétés paranormales, et à se laisser posséder par les esprits qui y logent. D’abord effrayantes, les séances deviennent vite un jeu idiot, provoquant l’hilarité d’une petite audience qui filme et partage sur les réseaux les vidéos de possession. La règle étant de ne pas tenir la main plus de 90 secondes, sans quoi l’esprit réveillé pourrait ne plus vouloir quitter son hôte…
De leur activité de YouTubeurs de ses deux réalisateurs – créateurs de RackaRacka, chaîne mêlant comédie et horreur cumulant près de 7 millions d’abonné·es –, le film conserve un goût prononcé pour les creepypastas, ces légendes urbaines hautement virales déclinées sous plusieurs formats et popularisées sur Reddit et Twitter. Et si l’idée de faire du spiritisme un phénomène viral est séduisante sur le papier, La Main s’égare dans une logique foraine abrutissante, et ne tire rien de son concept sinon des scènes horrifiques finalement très communes, qui ne questionnent jamais véritablement leur sujet.
Calibré pour un jeune public consommateur de vidéos YouTube et de frissons à moindre coût, le film tire surtout le portrait (fallacieux) d’une jeunesse affligeante de bêtise, avec ses personnages issus de la génération Z incapables de discernement, qui consomment le spiritisme comme une drogue trendy et s’esclaffent en assistant à des bad trips. On est loin de la noirceur racée d’It Follows (2014), qui sur un registre légèrement différent, interrogeait la notion de viralité par le truchement de l’horreur sans insulter l’intelligence de ses personnages, et de ses spectateur·ices.
La Main de Danny et Michael Philippou, en salle.
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