La justice californienne a débouté une organisation de lutte contre le Sida qui réclamait une intervention accrue des pouvoirs publics pour imposer le préservatif dans le milieu du X. L’organisation dénonce un retour en force du porno non protégé.
Colère chez les militants pro-capote de l’AIDS Healthcare Foundation (AHF), la plus grande organisation mondiale de lutte contre les maladies sexuellement transmissibles. La Cour d’appel de la Californie a débouté la semaine dernière l’organisation de sa demande de durcissement des contrôles sur le port du préservatif dans le milieu du X de Los Angeles. Motif : la politique en matière de prévention des maladies sexuellement transmissibles sur des tournages dépend uniquement des services de santé de la ville, et les « tribunaux ne peuvent aucunement intervenir ».
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Pour l’AHF, qui a publié dans la foulée du verdict un communiqué accusateur, la décision de la Cour d’Appel apparaît comme un aveu d’échec face à la recrudescence des cas d’IST sur les tournages pornos depuis le début des années 2000. Après une courte vague de prévention (provoquée par quelques affaires de contamination très médiatiques) l’industrie du X régresse en matière de protection selon l’AHF, qui appelle les services de santé à se mobiliser rapidement.
Prévention et répression
C’est en 2009 que l’organisation, « après avoir épuisé toutes les autres méthodes », décidait de mener l’affaire en justice. Une actrice porno venait d’être dépistée positive au HIV dans la vallée de San Fernando, le point névralgique de l’industrie du X, planté à deux pas des studios hollywoodiens. Le cas de trop pour l’AHF, qui réclamait à la justice californienne d’obliger les services de santé du comté de Los Angeles à prendre des mesures strictes pour imposer l’usage du préservatif sur les tournages de films pornos.
« Le comté de Los Angeles a le devoir de protéger la santé publique, l’une des plus grandes responsabilités d’un gouvernement local, indique l’AHF. Il ne peut simplement pas ignorer cette charge et laisser des milliers de personnes contracter des MST dans l’indifférence. »
En plus d’un nouvel effort de prévention, l’organisation souhaitait aussi une plus grande implication des autorités de santé publique : un dépistage obligatoire et fréquent, ainsi qu’une fermeture automatique des plateaux qui ne respecteraient pas les conditions de sécurité des acteurs. Déboutée en première instance, l’AHF n’a pas eu plus de chance en appel où la Cour a réaffirmé qu’elle ne pouvait interagir dans les affaires publiques du comté de Los Angeles.
« Le département de Santé continue de soutenir (…) les lois d’Etat qui visent à étendre les exigences vis-à-vis de l’industrie du film pour adultes, afin d’inclure l’usage du préservatif obligatoire » a néanmoins tenu à rassurer la porte parole du comté, Sarah Kissel.
Une situation alarmante
Le rejet de la Cour est d’autant plus préoccupant pour l’AHF que les cas d’IST ont connu une progression importante ces dernières années. Depuis 2004 et la révélation d’un cas de contamination dans le milieu du X, aucune action n’a été engagée par le comté de Los Angeles pour tenter d’enrayer la crise sanitaire selon l’AHF. Le refus d’obtempérer des studios de production (le porno protégé se vend moins bien), et l’indifférence des autorités publiques ont contribué à « une forte recrudescence d’IST parmi les acteurs X, incluant de nombreux cas de VIH, gonorrhée, syphilis, chlamydia, hépatites… » précise le communiqué.
Citant les chiffres du Département de Santé publique du comté, publiés en 2009, l’organisation rappelle que 21 acteurs de Los Angeles (seize hommes et cinq femmes) ont contracté le VIH entre 2004 et 2008, que 2 013 cas de chlamydia ont été dépistés entre 2003 et 2007, ou que 965 acteurs pornos ont été touchés par la gonorrhée. Un bilan très lourd pour la capitale du X, et qui risquerait de s’aggraver sans intervention urgente des autorités sanitaires.
« Le département de Santé publique recommande l’usage du préservatif sur les tournages, mais il n’a jamais pris de mesures pour s’assurer de son utilisation et protéger les acteurs » dénonce l’organisation, qui ajoute qu’elle entend continuer sa bataille judiciaire contre les autorités publiques.
« Les fonctionnaires du comté et les producteurs de porno doivent savoir que nous n’arrêterons pas nos efforts pour protéger la santé publique et lutter contre l’épidémie de MST dans l’industrie du film X » annonce le président de l’AHF, Michael Weinstein.
Romain Blondeau
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