La rencontre improbable de deux mondes dans une comédie à (re)voir.Longtemps, Gregory La Cava ne fut qu’un nom. Un nom oublié de presque tous, devenu un mot de passe pour cinéphiles, synonyme d’extrême rareté et de filmographie invisible. Au début de La Comtesse aux pieds nus, Maria Vargas disait à Harry Dawes qu’elle avait vu […]
La rencontre improbable de deux mondes dans une comédie à (re)voir.
Longtemps, Gregory La Cava ne fut qu’un nom. Un nom oublié de presque tous, devenu un mot de passe pour cinéphiles, synonyme d’extrême rareté et de filmographie invisible. Au début de La Comtesse aux pieds nus, Maria Vargas disait à Harry Dawes qu’elle avait vu ses films avec Carole Lombard ou Jean Harlow. Devant sa surprise, elle ajoutait : « Je peux vous citer Lubitsch et Fleming, Van Dyke et La Cava… » En 1952, quand Mankiewicz écrivait le scénario de La Comtesse…, Gregory La Cava mourait, à 60 ans, dans l’indifférence générale.
Comme toutes les comédies de La Cava, le rarissime La Fille de la 5e Avenue est fondé sur la collision improbable de mondes faits pour ne pas se rencontrer. Le cinéaste utilise deux liens privilégiés pour unir ces sphères aux cloisons étanches : l’alcool et l’attirance sexuelle, l’un permettant de libérer l’autre. La Cava est donc le grand cinéaste de la cuite et du bas de soie. Alcoolique notoire, sujet à de violents comas éthyliques, il savait d’expérience que la boisson a le don d’abolir bien des barrières et de favoriser les rapprochements les plus incongrus.
C’est le début du film, quand la blonde sans le sou (Ginger Rogers) et le milliardaire triste vont fêter l’anniversaire de celui-ci dans quelques boîtes, mettant au point la mise en scène à destination de la famille ingrate du vieil homme. Toujours en représentation, interprétant un rôle qu’elles improvisent au fur et à mesure pour parvenir à leurs fins, les héroïnes de La Cava se coulent dans un univers étranger afin de mieux le réformer et ainsi le faire leur. Chez La Cava, les femmes sont toujours actrices (excellentes) et les hommes toujours spectateurs (médiocres). La Cava est un cinéaste réaliste.