Docu choc sur les laissés-pour-compte
de l’Argentine contemporaine.
Fernando Solanas est ce qu’on appelle dans le langage
commun un “cinéaste engagéî, soit quelqu’un qui met
la forme (ses plans, cette manière de caler d’écrasants
intertitres entre les images, son découpage) au service
du fond : un discours social et des revendications
politiques. Cela donne à l’écran une certaine
imagerie militante, faite de gros plans mécaniques
sur les visages et de scènes un peu convenues
de manifestations. Mais cela produit aussi le meilleur :
une attention hors norme pour les plus délaissés
et les plus oubliés des habitants de l’Argentine
contemporaine, une exceptionnelle capacité d’écoute
à l’égard des personnages croisés sur sa route,
la volonté de transformer son cinéma en chambre
d’écho des récits de vies enregistrés des mois durant.
Dans La Dignité du peuple – dont le titre sonne plus
juste en version originale, La Dignidad de los nadies,
la dignité des “petits riensî dirait l’écrivaine indienne
Arundhati Roy –, on découvre des villages dont
les habitants sont si pauvres qu’ils ne jettent rien,
où des cantines collectives nourrissent des dizaines
de personnes avec un peu de polenta, de riz et
d’oignons ; et les ventes de médicaments au marché
noir pour pallier l’impécuniosité des hôpitaux
incapables d’acheter les produits nécessaires au
traitement de leurs patients. Le clou du film, c’est
sa partie consacrée à l’incroyable mouvement
d’agricultrices qui perturbent les ventes aux enchères
des fermes hypothéquées : avec leurs fichus
et leurs voix aigrelettes, elles ont inventé un style
de désobéissance civile impressionnant
d’humour et de ténacité.
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