Récit des actions terroristes de l’activiste Baader, mené tambour battant dans un film qui sacrifie l’analyse à l’efficacité.
Les faits réels, biographiques, entremêlés au mouvement de l’histoire, de la société d’un pays, inspirent de plus en plus de réalisateurs (W., Coluche, Mesrine, pour citer des exemples récents), au point que l’on se demande, inévitablement, si ce penchant n’est pas le signe d’une profonde panne d’inspiration scénaristique. Il se pourrait bien que cette tendance marque aussi la volonté du cinéma de se démarquer des images télévisuelles en offrant un champ de vision plus large – grand format oblige – que celui du petit écran. Soit une manière d’affirmer, de façon un peu naïve, la supériorité de la fiction cinématographique sur le reportage télévisé. Pour que la démarche soit réellement convaincante, encore faut-il ne pas se cantonner à une logique de surenchère et mettre pleinement en branle les outils réflexifs et romanesques du cinéma, car après tout, ce pendant fictionnel, la télévision le propose déjà depuis belle lurette, aussi pauvre soit-il. L’histoire sanglante de la bande à Baader – ce groupe d’activistes d’extrême gauche qui effraya et défraya la chronique dans l’Allemagne des années 70 – offre un scénario en or à quiconque veut traverser une zone agitée de l’histoire et satisfaire son goût pour les films d’action dynamités. De quoi fournir des prétextes suffisants à Uli Edel (réalisateur du désastreux Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée) pour “faire cinéma” tout en se donnant l’illusion de raconter une histoire pertinente. Certes, sa fresque des années de plomb est bien menée, comme on dit mollement, et contient nombre d’éléments passionnants, liés au sujet même : on plonge avec intérêt dans le climat politique et social de l’époque et l’on découvre à quel point Baader était débile. Mais ces aspects sont écrasés par le rouleau compresseur d’une mise en scène formatée, platement illustrative, qui finit par tout ramener sur le même plan d’action vide, au point que l’on se demande si le fond du film n’est pas interchangeable et s’il importe tant que ça au réalisateur, qui ne donne pas de perspective humaine à son sujet. Il est particulièrement frustrant que le film traite aussi superficiellement le personnage pourtant passionnant d’Ulrike Meinhof, cette journaliste qui intègre la bande et écrit ses manifestes. Comparé à Contrôle d’identité de Christian Petzold ou à Buongiorno, notte de Marco Bellochio, qui abordent également le terrorisme, le film d’Uli Edel est vraiment loin du compte.
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