Immersion dans les cercles de jeu à Paris : un premier film ambitieux malgré une fin un peu embrouillée.
C’est un film sur l’addiction. Comme souvent les premiers longs, animés par une fièvre semblable qui trouve à s’incarner dans le récit d’une passion. Ici, elle sera double : d’un côté celle qui unit Ella, une serveuse de restaurant, à un nouvel employé, Abel ; de l’autre le climat électrique des salles de jeu, la nuit, à Paris.
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Dès le départ, les deux dépendances sont liées, entrelacées, elles ne font qu’une, et Ella tombe amoureuse en même temps, du jeu et de l’amour, du pari, de l’art de jouir et de gagner en ignorant qu’il existe aussi un art de perdre, ce que son compagnon volatile ne tardera pas à lui apprendre : les affres du jeu, ses jours de dèche et surtout les prêteurs sur gages qui veillent comme des vautours.
Marie Monge, 31 ans, parvient à restituer cette fièvre, de sa caméra circulant avec élégance dans ces casinos souterrains comme à l’intérieur de sanctuaires, de lieux sacrés, tournoyant religieusement autour de ses adeptes, lovée dans l’attente, le bruit des billets, l’adrénaline. “Toi aussi tu l’as ressentie la décharge”, dit Abel à Ella la première fois. Le couple s’achemine ensuite vers une tentative de vie plus rangée, en vain : l’addiction se transforme en cavale, en fuite frénétique du réel.
C’est là aussi que l’on perd un peu le fil : alors que la première partie était portée par une belle énergie, à la fois documentaire et baroque, la suite du récit s’effiloche dans une descente aux enfers moins personnelle et plus convenue. Joueurs n’en demeure pas moins un premier film audacieux et habité, qui épouse un principe essentiel : non pas une volonté d’enrichissement de ses personnages, mais un vœu de légèreté, de dépouillement, meilleur moyen, pour son héros autodestructeur, de disparaître.
Joueurs de Marie Monge (Fr., 2017, 1 h 45)
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