Le héros de Jackass a pris un coup de vieux : dans son nouveau film, “Bad Grandpa”, Johnny Knoxville incarne un papy queutard de 86 ans qui traverse l‘Amérique avec son petit-fils.
Bad Grandpa, sur les écrans cette semaine, est un film hybride et inégal, alterne scènes de cascades (la marque de fabrique de la série) et caméras cachées souvent drôles, le tout enrobé par un scénario mièvre et vulgos. L’histoire déroule le road-trip d’un vieillard obligé de transporter son petit-fils à l’autre bout des Etats-Unis – pile au moment où papy s’apprêtait à célébrer indignement la mort de sa femme, en chauffant tout ce qui se passe. Mais le grand-père et son petit-rejeton vont se trouver plein de passions communes, comme péter ou dire des gros mots. Rencontre avec Johnny Knoxville, créateur génial, peut-être un peu à l’étroit dans son éternel costume de cascadeur rigolo.
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Il y a déjà eu trois longs métrages Jackass. Bad Grandpa, c’est le quatrième volet ?
Johnny Knoxville – Oui et non. Les autres films Jackass sont juste des successions de saynètes. Avec Bad Grandpa, on a plutôt voulu faire un vrai film… Avec, pour la première fois, une intrigue… Oui. La gestation du film a été difficile, mais fun. Avec mes coscénaristes Spike Jonze et Jeff Tremaine, on s’est dit que le meilleur moyen de construire un long métrage entier sur le personnage de Bad Grandpa, c’était de raconter une histoire. La narration s’est construite au fil du tournage : on tournait pendant deux semaines, on écrivait et montait les deux semaines suivantes, puis on retournait, on réécrivait… Au bout de cinq mois à ce rythme, on a récolté suffisamment de matériau pour filer une histoire. Et au final, c’est en studio de montage qu’on a vraiment trouvé le film. En ce sens, c’est un peu comme un film expérimental des années 70.
Pourquoi avoir choisi d’incarner un vieillard de 86 ans ?
Au début, c’était juste une idée parmi d’autres, créer un personnage de vieux. Mais avec le temps je me suis rendu compte que ce grand-père était la figure parfaite pour raconter ce que je voulais raconter. Et bien sûr, pour frapper les esprits, il fallait que je l’incarne en étant déguisé. Ça ne m’a pas déstabilisé plus que ça car j’ai souvent eu recours au maquillage, dans la série comme dans les films Jackass.
Le film contient des scènes de caméras cachées assez osées. C’est plus facile de tourner ce genre de scènes en étant caché derrière un personnage créé de toutes pièces ?
Franchement, j’aimerais pouvoir tourner des caméras cachées tout en restant moi-même. Mais l’avantage de se grimer en vieillard, c’est qu’on attire la sympathie des gens. Irving Zisman est un vieillard inoffensif… Et si vous ajoutez à ça un gosse de 8 ans très mignon, ça devient beaucoup plus facile de mettre les gens dans votre poche pour mieux les berner.
Le jeune acteur qui incarne votre petit-fils – Jackson Nicoll – est de toutes les scènes et apporte beaucoup au film. C’est qui la star du film, vous ou lui ?
Le film est ce qu’on appelle aux Etats-Unis un “two-hander”, c’est-à-dire qu’il repose sur notre duo. Mais, clairement, le gamin me vole la vedette ! Ça me va. Au fond, je ne pourrais pas être plus satisfait. Ce gosse est une perle rare. Trouver un enfant-acteur qui soit mignon et intelligent, ce n’est pas si dur. Mais en trouver un qui peut piéger des adultes, qui n’a peur de rien, c’est une autre paire de manches. En fait, vous n’en trouverez pas d’autres : il n’y en a qu’un, et c’est Jackson.
Et il n’a pas été trop choqué par les nombreuses scènes où vous parlez de cul ?
Non, non, on ne pouvait pas – et on ne voulait pas d’ailleurs – utiliser un vocabulaire trop cru devant l’enfant. Avec un cousin à moi, on a rédigé un dictionnaire de mots et de formules qu’on pouvait utiliser en sa présence : des expressions qu’un adulte sait être salaces, mais qui ne veulent rien dire pour un gosse. Et quand le vieux fait des trucs lubriques, comme aller dans un strip-club ou se coincer la bite dans un distributeur, le gosse n’était pas là pour voir ça. On a fait très attention à ne pas l’exposer à ces choses-là.
En regardant Bad Grandpa, on pense irrésistiblement à Borat. C’est une inspiration que vous revendiquez ?
Je suis un grand fan de Sacha Baron Cohen, il a beaucoup de talent. Ses films Borat et Brüno sont hilarants. Mais en ce qui concerne le personnage de Bad Grandpa en lui-même, l’inspiration vient plus du côté de mon père ! [Rires]. Disons qu’Irving Zisman est une sorte de version vieillie et pervertie de moi-même.
C’est Sur la route de Jack Kerouac qui vous aurait donné l’envie d’écrire et de jouer la comédie. C’est vrai ?
J’ai vraiment adoré ce livre. Mon cousin – le même cousin qui m’a aidé à écrire le dictionnaire pour le film – me l’a donné à lire quand j’avais 14 ans. Ça m’a vraiment marqué. J’y ai découvert un univers que je n’imaginais pas. Ça m’a donné envie de sortir, de voir ce que le monde avait à offrir.
Vous lisez beaucoup ?
De Kerouac, j’ai aussi lu Les Clochards célestes, et Mexico City Blues, mais je n’ai pas trop accroché. Sur la Route reste mon préféré. Je suis fan de tous les écrivains de la Beat Generation, du poème Howl d’Allen Ginsberg… Et j’adore Céline. J’ai beaucoup lu parce que j’ai souvent été malade dans ma vie, et pendant ces moments je ne pouvais que lire ou regarder la télé.
Y a-t-il encore une cascade que vous n’avez pas tentée et que vous aimeriez réaliser ?
Je ne sais pas si je vais faire un autre film Jackass. Disons que c’est une probabilité à 50-50. Mais j’écris encore beaucoup – juste au cas où. Donc la réponse est oui, j’ai pensé à des cascades. Mais je ne veux pas te les dire : ça nuirait à l’effet de surprise si je décide de les faire un jour.
Vous avez 42 ans. Vous ne vous dites jamais : “Je suis trop vieux pour ça ?”
J’étais déjà trop vieux quand j’ai commencé ! J’avais 29 ans. Bien sûr il y a un moment où on n’a plus l’âge pour les cascades, mais ce n’est pas encore maintenant.
La série et les films Jackass vous ont rendu très populaire. Mais n’aimeriez-vous pas un jour vous essayer à autre chose, lancer de nouveaux projets ?
Avec la société de production que je possède avec Spike Jonze et Jeff Tremaine, on a déjà fait il y a quelques années un documentaire, The Wild and Wonderful Whites of West Virginia, sur une famille de hors-la-loi dans une petite ville de Virginie-Occidentale. Je le recommande, ainsi que The Birth of Big Air, un documentaire sur la star du BMX Matt Hoffman. Ce sont deux films différents de ce qu’on fait d’habitude, des films que j’aime beaucoup. Mais à l’avenir, je réécrirais sûrement des films comme Bad Grandpa, avec des farces et des cascades. Bien sûr, dans l’idéal, j’aimerais aussi faire d’autres choses, plus de choses, qu’il n’y ait pas que Jackass dans ma vie. Mais si ce n’est pas le cas, ça me va aussi. Je m’estime chanceux que les choses me soient arrivées telles qu’elles me sont arrivées. Je suis fier de Jackass. Ça pourrait être bien pire.
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