Actuellement à l’affiche de « Atomic Blonde », l’acteur-colosse John Goodman est reconnaissable pour sa carrure et sa grande gueule. Frères Coen, bad guy tourmenté, décalages contrôlés… Focus sur un acteur plein de générosité et au charisme démesuré à travers sept rôles cultes.
La carrure, la grande gueule : check. Son nom ? Un peu moins. Même le moteur de recherche de YouTube peine à adhérer, il veut nous retourner vers un certain John Newman, un chanteur bankable porté disparu depuis 2013… Et pourtant, le nom de John Goodman (le seul, l’unique) n’a cessé d’enrichir le paysage cinématographique hollywoodien des années 80 jusqu’à aujourd’hui avec la sortie récente de Atomic Blonde, film d’action porté par une Charlize Theron au top et dans lequel l’acteur prête ses traits à un agent américain.
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Trois décennies au cours desquelles l’imposant Goodman est apparu à travers pas moins de 80 rôles : comédie, films de gangsters, animation, frères Coen… Un acteur à l’historique aussi dense que sa corpulence, sans oublier tout le charisme qui va avec. Du gros nounours du quotidien jusqu’au bad guy dingo et tourmenté, retour sur la carrière d’un acteur connu aussi pour avoir excellé dans les seconds rôles. Seconds rôles, vraiment ? Pas de quoi s’inquiéter : John Goodman en impose. Illustrations ici avec ses rôles les plus cultes.
Arizona Junior de Joel Coen (1987)
L’année 1987 représente sa première collaboration avec les frères Coen mais aussi la promesse d’une carrière marquée par des rôles caractériels mi-balourds, mi-sensibles. Dans Arizona Junior, John Goodman prête ses traits à un taulard fugitif, Evelle Snoats, et ancien compagnon de cellule de Hi, le personnage principal interprété par Nicolas Cage. Accompagné d’un autre échappé de prison (son frère Gale), Evelle va vite rendre les choses compliquées pour Hi et sa femme Ed : déjà témoins du vol effectué par le couple d’un bébé, Evelle et Gale s’emparent du nourrisson, s’échappent, et, au passage, braquent une épicerie : deux personnages si propres au ton caustique des frères Coen. John Goodman ici : des cris de folie, un attachement instantané. Pas commun, déjà.
Arachnophobie, de Frank Marshall (1990)
Trois ans plus tard, John Goodman incarne une fois encore un rôle qui prouve son goût pour le décalage. Mis en scène par Frank Marshall, le fidèle producteur de Steven Spielberg, Arachnophobie parle d’araignées, oui, mais aussi de Delbert McClintock, un exterminateur engagé pour chasser les mygales et consorts au coeur d’une grange familiale. Loin d’être la mascotte d’un potentiel nanar, Goodman incarne ici un exterminateur du quotidien et hospitalier, loin du délire d’Arizona Junior, mais si proche de vous et de votre peur, si elle existe, de ces bestioles octopodes. Un exterminateur gentil, en somme. « I’m bad« , dit-il, l’air affirmé. On y croit plus ou moins.
King Ralph, de David S. Ward (1991)
John Goodman a toujours cette faculté de se présenter là où on ne l’attend pas. Sa prestation dans King Ralph est un délicieux écho à cette sensation : lui et sa gueule de gangster se retrouvent ici en plein milieu d’une mascarade royale au cours de laquelle il doit prendre la succession du Roi d’Angleterre et ainsi loger à Buckingham… Que de décalages, d’autant plus que son personnage excelle dans la musique de salon. Un éléphant dans un magasin de porcelaine, en somme. Meilleure illustration : cette scène rock’n roll au coeur de Buckingham qui montre un John Goodman déchaîné et au déhanché inoubliable, tout ça sous les yeux désabusés de la représentation monarchique. Ou quand John Goodman porte bien son nom.
https://www.youtube.com/watch?v=LIjLSoDCpb8
Barton Fink, de Joel et Ethan Coen (1991)
« I’ll show you the life of the mind ! ». L’année suivante représente un tournant dans la carrière de John Goodman qui, pour sa deuxième collaboration avec les Coen, incarne un voisin peu recommandable, genre serial killer. Récompensé de la Palme d’Or au Festival de Cannes, Barton Fink donne l’occasion à Goodman de se faire connaître dans la haute sphère hollywoodienne en récoltant notamment une nomination au Golden Globes. Là encore, son personnage est si attachant, mais si dérangé. Meilleur témoignage de cette dualité qui rattrape souvent les rôles du monsieur, cette scène surréaliste et littéralement enflammée du couloir dans laquelle la fureur de John Goodman détruit tout sur son passage. Un rôle culte + une scène culte : John Goodman au sommet.
Panique sur Florida Beach, de Joe Dante (1993)
Rares sont les premiers rôles dans la carrière de John Goodman, mais il se pourrait bien que celui-ci soit le plus élégant de toute sa filmographie. Dans Panique sur Florida Beach, Goodman incarne une sorte d’Alfred Hitchcock du film d’horreur, précurseur du film du monstre et de nouvelles technologies intégrées au sein même de la salle de cinéma (des ressorts et des décharges électriques intégrés au siège). Dans un climat de menace nucléaire, le paroxysme de la peur et de l’expérience cinématographique sont défendus ici par le personnage de Goodman, plus mégalo que jamais et à la recherche de la moindre esquisse de panique. Une mise en abîme remarquablement menée par Joe Dante, cinéaste anti-chambre de l’oeuvre spielbergienne.
The Big Lebowski, de Joel et Ethan Coen (1998)
A film culte, rôle culte, c’est bien connu. Et John Goodman n’y est pas étranger. Fidèle compagnon du « Dude » dans le film, l’acteur incarne Walter Sobchak, vétéran du Vietnam complètement traumatisé par son expérience militaire, jusqu’à la ressasser constamment dans les conversations. Sa perte de sang froid constitue une seconde nature du personnage : il n’hésite pas à sortir son flingue pour régler un différend à propos d’un score lors d’une partie de bowling. Et pourtant, le caractère de ce personnage en fera toute sa légende, d’où l’attachement qu’il suscite. Goodman s’en donne à coeur joie chez les Coen, jusqu’à provoquer l’inconcevable dans la scène, elle aussi bien connue pour son décalage, des cendres de Donny – le souffre douleur de Goodman tout au long du film.
10 Cloverfield Lane, de Dan Trachtenberg (2016)
Fini de rire. Dans 10 Cloverflied Lane, huis-clos post-apocalyptique sorti l’an passé, John Goodman joue encore un personnage tourmenté, mais qui n’aspire ni le ridicule de sa condition ni le moindre décalage. Peut-être que nous tenons ici l’un de ses rôles les plus flippants : sa carrure et sa voix grave sont merveilleusement exploités dans le film, de quoi fabriquer un personnage terrifiant. Ce qui est assez unique dans la filmographie de l’acteur. Gênant, obsédé, autoritaire… Un John Goodman nouveau et grandeur nature qui prouve que la comédie n’est pas son seul ressort.
En bonus…
… pour finir en beauté. Expert en comédie et en personnages loufoques, John Goodman excelle également dans le pétage de câble. S’il fut difficile pour nous de répertorier ses meilleurs rôles – et ses nombreux passages du côté de l’animation -, ce super-cut rejoint notre idée selon laquelle l’acteur suscite un attachement aussi chaleureux que ses colères instantanées. John Goodman, une pure folie qui nous fait du bien.
https://www.youtube.com/watch?v=Zag4jgtqm1s
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