Géraldine Nakache signe la chronique douce-amère de deux sœurs devenues étrangères l’une à l’autre.
Ce sont deux sœurs, l’une joyeuse et émotive, mâchonnant de vieux rêves d’adolescente (intégrer le crew de choristes de Céline Dion), l’autre grave et discrète, noyant sa dépression dans une triste vie d’infirmière workaholic. L’une est jouée par Géraldine Nakache, l’autre par Leïla Bekhti, tandem d’un Tout ce qui brille qui fête ses dix ans (ouch), et dont le vieux souvenir d’allégresse épiphanique donne à ce nouveau film à deux un goût de retrouvailles.
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Mélancolie de la trente-cinquaine
Or, les personnages ont changé, mais surtout l’ambiance, dans cette chronique douce-amère marquée par le passage de la trente-cinquaine, le lointain souvenir de l’insouciance et l’apprentissage du métier de vivre. Au détour d’une échappée commune dont les sœurs se seraient volontiers passées (elles ne s’entendent plus de longue date) se noue une comédie de la réconciliation impossible qui nous fait certes rire – belle galerie de dingos wannabe choristes, stéréotype bien troussé de papa poule (Patrick Timsit) –, mais a surtout un beau vague à l’âme.
Le rire est parfois limite en trop (Timsit fait le bègue ou le sourd devant les voisines de ses filles, prisonnier d’une vieille vanne dont il n’arrive plus à se défaire – c’est drôle, mais ce n’est pas le personnage), et surtout il couve une vraie mélancolie : celle des dingos eux-mêmes, toujours un peu des âmes perdues, enfants-adultes douloureusement inquiets, et celle des deux sœurs, dont la mésentente outrepasse les codes du buddy movie. Entre l’intarissable demande d’affection de Nakache et la gravité profonde d’une Leïla Bekhti de plus en plus convaincante dans la noirceur (on attend Chanson douce de Lucie Borleteau), se joue un tragique aveu d’éloignement de deux sœurs devenues étrangères – et on s’est brièvement demandé en cours de route si on avait tant besoin, ou même envie, d’en rire.
J’irai où tu iras de Géraldine Nakache, avec elle-même, Leïla Bekhti, Patrick Timsit (Fr., 2019, 1 h 40)
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