Un morne mélo social sur la filiation.
Je t’aime, je te tue… Air connu. Air également connu au cinéma que celui des relations conflictuelles entre parents et enfants. Comme son titre l’indique, le principe du film, malgré une situation d’ensemble très différente, rappelle celui du premier long métrage de Xavier Dolan, J’ai tué ma mère. Mais les deux titres sont inversés puisque en fait le Québécois aborde le sujet par la face métaphorique tandis que le père et le fils Miller (étonnant symptôme de névrose, ou exorcisme d’un démon personnel, puisqu’ils ont décidé de traiter ensemble ce sujet sur la filiation) se contentent d’illustrer avec application un triste fait divers. D’où le contraste flagrant entre le Canadien, presque baroque, raffiné, dont même les maladresses sont charmantes, et la pesanteur pachydermique de cette adaptation d’un article d’Emmanuel Carrère sur une affaire réelle, qui se solde par un concentré de tous les effets pervers de l’œuvre de Pialat sur le cinéma français. Bref, l’hystérie à tous les étages et à tout bout de champ masque mal la profonde vacuité de ce film incolore et inodore sur les soubresauts d’un jeune homme taraudé par le fait d’avoir été abandonné par sa mère, qui renoue avec elle dans des conditions troubles. Relation qui dérape dramatiquement… Le problème n’est pas le sujet, ni même le style hybride et indécis de la réalisation, mais l’assommante linéarité du processus. Malgré (ou à cause de) l’adjonction factice de flash-backs pour décrire les ratés d’une enfance perturbée par une mère irresponsable, le film ne semble se justifier que comme écrin de son acting out final.
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Autrement dit, tous les atermoiements et contorsions de ce malheureux garçon sont d’une telle banalité, d’une telle morosité qu’ils ne peuvent être transcendés que par un acte un peu extraordinaire, qu’on attend inexorablement. Il faut subir une heure vingt de plats clichés sur la banlieue, sur les relations parents-enfants, sur les services sociaux, etc., pour entrevoir enfin où le film veut en venir et ce que son titre recouvre. Une telle construction fait tout pour décourager le spectateur car quasiment aucun crescendo, aucune tension ne sont ménagés avant les dernières minutes précédant un acte violent. Cet inextricable écheveau de séquences convenues à la Pialat et de fatalisme caricatural est une mécanique qui tourne dans le vide.
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