C’est clair, ce film ne vaut pas une roupie à côté des chefs-d’oeuvre indiens de Ray, Ghatak, Guru Dutt. En même temps, comme ça se passe en Inde et comme la majorité des acteurs ont la fraîcheur des gens du cru, on prend son mal en patience en suivant sans déplaisir la partie documentaire du […]
C’est clair, ce film ne vaut pas une roupie à côté des chefs-d’oeuvre indiens de Ray, Ghatak, Guru Dutt. En même temps, comme ça se passe en Inde et comme la majorité des acteurs ont la fraîcheur des gens du cru, on prend son mal en patience en suivant sans déplaisir la partie documentaire du film, tourné de la source du Gange à son embouchure. Et bien que le scénario soit simpliste et sans ressort, il a toutefois pour vertu de mettre en valeur la très belle Smriti Mishra, une danseuse de khatak qui incarne l’héroïne Zehra. Alors on relativise son agacement.
En fait, ce film porte les stigmates de sa production hybride (franco-indienne). Réalisé par un écrivain indien installé à Paris, Vijay Singh, Jaya, fille du Gange met précisément en scène un Indien francisé, Nishant, qui retourne à ses racines, ou plutôt à sa source, dans l’espoir chimérique de retrouver un être mythique, Jaya. Une manière de symboliser la propension des exilés à idéaliser leur pays d’origine. Finalement, au lieu d’une créature de rêve, Nishant fera la connaissance au bord du grand fleuve d’une femme très réelle, la charmante Zehra, élevée dans la tradition des courtisanes d’antan, c’est-à-dire férue de poésie et experte en danse, et accessoirement prostituée dans un bordel, qu’il arrachera à sa triste condition, avant de lâcher cette jolie proie pour l’ombre, c’est-à-dire l’insaisissable Jaya… Une sorte de conte philosophique un peu fade donc, à l’instar du personnage principal, bellâtre occidentalisé, mais tout cela est heureusement épicé, en plus de Zehra, par les divers personnages croisés lors du voyage : le gardien accueillant de l’ermitage de montagne, le vieillard bienveillant du bus, le sbire du bordel qui ponctue chacune de ses tirades avec un claquement de langue, l’ami préfet de Nishant qui l’asperge joyeusement de poussière rose à l’occasion d’une fête, etc. Les voyages touristiques ont leurs avantages on voit du pays et des gens et leurs inconvénients on surfe sur la réalité et les rapports humains restent éphémères et superficiels. Mais tant qu’à décrire le sentiment d’étrangeté qui peut gagner le voyageur circulant en Inde, on préférait le point de vue plus curieux et personnel de Nocturne indien d’Alain Corneau.
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