Pour fêter la reprise de « Cinq pièces faciles », classique du Nouvel Hollywood signé Bob Rafelson, rappel des quinze meilleurs films de son acteur principal, le monstre sacré Jack Nicholson
Vieillissant et plus très actif, Jack Nicholson demeure ce qu’on appelle une légende vivante, un des plus immenses comédiens en activité au même titre que Bob De Niro ou Al Pacino, un type qui a contribué à redéfinir la notion d’acteur et à recomposer le paysage du cinéma américain. Voici donc ses 15 films et rôles selon nous les plus décisifs.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
La Petite Boutique des horreurs de Roger Corman (1960)
Cette histoire d’un fleuriste qui élève une plante carnivore et vampiresque est le premier fait d’arme notable de l’acteur. Tout est cheap et kitsch et fun dans ce film tourné en deux jours pour 27000 dollars par le pape de la série Z, Roger Corman. Mais Corman est quand même le type qui a fait débuter Coppola, Scorsese, Dante, et donc Nicholson, qui a tourné trois films sous sa houlette dans les années soixante.
Back Door to hell de Monte Hellman (1964)
Dans ce film de guerre subtil, NIcholson joue l’intellectuel d’une petite patrouille chargée d’espionner les Japonais et de repérer leurs positions avant de donner l’assaut. La mise en scène d’Hellman n’héroïse pas les GI’s et met le frein sur le patriotisme impérial étoilé en questionnant le sort de prisonniers japonais. Nicholson tournera ensuite avec Hellman Ride in the whirlwind et The Shooting, deux westerns mettant à distance les codes du genre.
Easy Rider de Dennis Hopper (1969)
Faut-il encore présenter ce fleuron du Nouvel Hollywood et du cinéma constestataire contemporain du mouvement hippie ? Aux côtés des cowboys-bikers Hopper et Peter Fonda, Nicholson joue le farfelu de la bande, une tête brûlée sympathique carburant à toutes les substances possibles, et démontre tout son potentiel comique.
Les Motos de la violence de Martin Cohen (1970)
On ne l’a pas vu mais ce « biker movie » semble l’antithèse du précédent, mettant en scène de méchants motards alliés à des paysans mexicains patibulaires qui s’en prennent à une femme enceinte.Le casting est un véritable who’s who du Nouvel Hollywood puisque figurent aux côtés de Nicholson, Bruce Dern et Diane Ladd, les parents de Laura, ainsi que Harry Dean Stanton.
Cinq pièces faciles de Bob Rafelson (1970)
C’est le Nicholson movie qui ressort ces jours-ci et nous vaut cet article. L’histoire d’un fils de bonne famille qui fuit sa famille et sa classe sociale pour devenir ouvrier : mouvement typique de ces années de la contre-culture mais qui prend une belle résonance en nos temps d’incertitudes, de doutes et de nuits debout. La mise en scène souple et libre de Rafelson est synchrone de son propos puisqu’elle fuit de son côté les codes spectaculaires et les mécaniques de causes et effets du cinéma américain dominant. Après Corman et Hellman, Rafelson est le troisième cinéaste avec qui Nicholson entretiendra une relation fidèle puisqu’ils tourneront encore quatre films ensemble (dont King of Marvin gardens et Le Facteur sonne toujours deux fois) sur une période allant jusqu’à 1996.
Chinatown de Roman Polanski (1974)
Où Nicholson ré-endosse le costard et le chapeau mou de Sam Spade et Philip Marlowe, les privés des années trente, dans cette relecture du « noir » par Polanski, à la fois chic, violente et rétro. On n’oublie pas la scène où le privé se fait taillader le zen au couteau (c’est Polanski lui-même qui tient l’arme blanche) avant de passer le reste du film avec un sparadrap sur le pif.
Profession : reporter de Michelangelo Antonioni (1975)
Un journaliste échange son identité avec un mort pour fuir sa vie et surtout sa femme. Il se retrouve poursuivi par sa famille mais aussi par un groupe de révolutionnaires africains qui le prennent pour le décédé. De Barcelone à l’Andalousie, il prend la tangente en compagnie d’une jeune femme qui a les traits sexys et l’esprit juvénile de Maria Schneider. Ce road-movie politique, métaphysique et superbement stylisé se conclue par un extraordinaire plan-séquence circulaire où le héros rencontre… son destin. Magnifiquement dirigé par Antonioni, l’acteur en fait peu, tenu à distance de ses tendances au cabotinage. Parmi les grands films de la filmo Nicholson, on tient ici le chef-d’oeuvre absolu.
Vol au-dessus d’un nid de coucou de Milos Forman (1975)
Interné dans un asile psychiatrique mais faussement fou, Nicholson prend la tête d’une révolte des pensionnaires contre leurs conditions d’internement. Une comédie grinçante, un brin histrionique, qui fut un immense succès et dans laquelle Jack s’en donne évidemment à coeur joie.
Missouri Breaks d’Arthur Penn (1976)
Un western qui vaut entre autres pour l’affrontement de deux vaches sacrées : Nicholson et son aîné de l’actor’s studio Marlon Brando. Un duel au sommet entre deux cabotins de génie où Brando gagne la palme du surjeu alors que Nicholson remporte le trophée de la retenue.
Shining de Stanley Kubrick (1980)
Autre sommet de la filmo nicholsonienne où l’acteur déploie sa face la plus inquiétante avec ses yeux qui roulent et son regard par en-dessous. On n’oubliera pas son imitation moqueuse de son épouse (Shelley Duvall) ni son entrée à coup de hache dans la salle de bain familiale au cri de « here’s Johnny » qui était le lancement du Tonight show de Johnny Carson, célèbre talk-show de soirée de l’époque. Humour noirâtre de Kubrick et de Nicholson qui placent l’annonce d’un présentateur télé populaire dans la bouche d’un père psychopathe. Ajoutons que sous la houlette maîtresse de Kubrick, l’hôtel Overlook joue aussi bien que l’acteur.
Tendres Passions de James L. Brooks (1983)
Enorme succès que cette romcom’ mettant aux prises deux tourtereaux quinquagénaires. Jack déploie sa vista comique et affronte une partenaire à la hauteur en la personne de Shirley McLaine. Brooks est un autre cinéaste fidèle à l’acteur (et vice-versa). Ils retravailleront quatre fois ensemble (Broadcast news, Pour le meilleur et pour le pire, Comment savoir ?, etc).
L’Honneur des Prizzi de John Huston (1985)
Dans cette comédie sur une famille mafieuse, NIcholson donne libre cours à deux lignes de force de son jeu : la vis comica et le don pour faire peur. Il avait rencontré John Huston sur le tournage de Chinatown ; là, c’est au tour de la fille, Angelica, avec qui il formera un couple légendairement orageux.
Les Sorcières d’Eastwick de George Miller (1987)
Dans ce film mineur, Jack fait le cabot majeur, mixant comme souvent la dinguerie à foutre les jetons à la puissance comique innée. Un de ces personnages diaboliques qui annoncent le Joker.
Batman de Tim Burton (1989)
Encore un pic,entre la maestria gothique de Burton et le comique diabolique de Nicholson qui fait vraiment le Jack. Le Joker est comme le rôle superlatif taillé à sa démesure, celui qui empile et encapsule tous les psychopathes histrionesques qu’il a joué auparavant. Avec Burton, il remettra le couvert dans Mars attacks où il joue – quoi d’autre? – le président des Etats-Unis.
Les Infiltrés de Martin Scorsese (2006)
Dans ce thriller tendu où Damon et Di Caprio échangent leurs rôles (infiltrations réciproques), NIcholson tire brillamment son épingle du double double jeu qui l’entoure, avec toujours ce mélange de cabotinage et de génie, de folie anxiogène et de drôlerie. En scrutant ce visage triangulaire et cet étrange regard incertain qui nous auront fasciné pendant cinq décennies, on a le sentiment que ce type pourrait nous étriper avec le sourire le plus radieux.
{"type":"Banniere-Basse"}