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INTERVENTION DIVINE
d’Elia Suleiman, avec lui-même, Manal Khader, Nayef Fahoum Daher (2002, Palestine, 92 mn)
DANDYSME DE RÉSISTANCE > La chronique hilarante d’un scandale historique, politique et humain : la guerre en Palestine.
Depuis Chronique d’une disparition, le film précédent d’Elia Suleiman, rien n’a changé.
Les Palestiniens continuent d’attendre. Tout est donc bien pire. L’entropie gagne. Et le Père Noël qui court à travers le paysage biblique finira avec un couteau dans le ventre… Nazareth, la ville d’Elia Suleiman, est filmée pour ce qu’elle est : une réserve indienne, avec ses rituels déréglés, ses habitudes recuites, ses gestes absurdes, son décalage généralisé. Dès les premières séquences du film, Suleiman impose une ligne très claire, une frontalité teintée de minimalisme qui permet de cerner l’étendue du désastre à travers un quotidien de crise perpétuelle. Pour survivre, il ne reste qu’à « faire comme si… », comme si le bus passait encore, comme si l’on pouvait encore se permettre des querelles de voisinage à propos de l’évacuation des déchets, comme si le temps continuait de s’écouler, comme si le résultat de France-Paraguay importait vraiment. Alors que tout s’effondre à vue d’œil… En multipliant les effets de cache et les fausses pistes, et en distendant les liens entre causes et conséquences, Suleiman parvient à rendre très drôle une situation bloquée. La moindre action véritable est sans cesse différée, et le seul réconfort consiste à répéter des attitudes inutiles. Ce recours systématique au gag et à l’observation ô combien distanciée de la gravité des choses est un dandysme de résistance. On est là entre Jacques Tati, Buster Keaton et Astérix en Corse, dans une version épurée de Chronique d’une disparition, portée par une parfaite maîtrise de l’espace et des enchaînements.
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