Début du XXIe siècle, notre sauveur – le héros d’action – semble avoir pour initiales JB : James Bond (encore), Jack Bauer (24) et Jason Bourne (La Vengance dans la peau). Bloggeurs et internautes s’amusent à prendre les paris sur une bagarre entre les trois. Pour notre part, on imagine la scène suivante : Bourne […]
Début du XXIe siècle, notre sauveur – le héros d’action – semble avoir pour initiales JB : James Bond (encore), Jack Bauer (24) et Jason Bourne (La Vengance dans la peau). Bloggeurs et internautes s’amusent à prendre les paris sur une bagarre entre les trois. Pour notre part, on imagine la scène suivante : Bourne empêchant Jack Bauer de torturer 007 version Daniel Craig. De ces trois pros, Jason Bourne est probablement la figure la plus intéressante, par sa réticence à jouer les tueurs à gages au service de l’Etat. Et aussi par son physique : ni suave, ni rugueux, Matt Damon est une géniale idée de casting, avec son visage de chérubin idéaliste mais désespérément soucieux d’exposer sa part d’ombre (comme dans Le Talentueux M. Ripley, et surtout Les Infiltrés de Scorsese). La trilogie Bourne dessine merveilleusement ce contraste, entre des scènes d’action tendues, maîtrisées, et leur protagoniste qui ne voudrait surtout pas être là, à tirer sur tout ce qui bouge. Car, comme un saumon, Jason Bourne est d’abord obsédé par l’idée de remonter à la source, tout en affichant une rébellion adolescente qui sied aux traits juvéniles de Damon. Voyons les faits. Dans sa première bagarre (La Mémoire dans la peau), Bourne se débarrasse facilement de deux policiers, tout en étant effrayé par ses mouvements automatiques de combattant, comme si son corps ne lui appartenait plus. On est ici proche de Spider-Man et des X-Men, où se découvrir des pouvoirs est une métaphore des tourments adolescents, du corps qui change. Ensuite, Bourne se découvre des parents symboliques, castrateurs et possessifs, qui l’empêchent de se caser avec sa petite amie (cf. La Mort dans la peau) et réprouvent ses velléités d’indépendance : le gouvernement américain. Dans La Vengeance dans la peau, Bourne rentre chez lui (les Etats-Unis) pour demander des comptes à ses géniteurs (les créateurs du programme de barbouzes l’ayant recruté) : la trilogie se conclut dans un hôpital et sur Bourne flottant inconscient dans l’eau (bouclant la boucle avec le début de La Mémoire dans la peau). Ironiquement, cette trajectoire prénatale importe plus que la quête d’identité motivant le héros, puisque, à part son nom, on ne saura jamais vraiment qui il est, s’il écoute Timbaland ou boit du chardonnay. Jason Bourne est une page volontairement blanche, cherchant plus à effacer son identité qu’à la retrouver. Dans l’espoir de renaître, pour ne pas tomber dans la routine névrosée des deux autres JB. C’est le sens du dernier plan fœtal de La Vengeance dans la peau : l’idée d’un quatrième volet ruinerait l’élégance de ce motif. Bourne again ? Plutôt born again.
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