En 1983, des enfants de la nomenklatura soviétique détournent un avion pour fuir l’URSS. Un récit haletant basé sur des faits réels.
C’est un fait historique, un fait divers connu : le 18 novembre 1983, sept jeunes Géorgiens, citoyens de l’URSS, pour la plupart enfants de membres éminents de la société de Tbilissi, tentent de détourner un avion de l’Aeroflot pour passer à l’Ouest en franchissant la frontière turque. Ils échouent. Les forces d’assaut russes criblent l’avion de balles, trois membres de l’équipage sont abattus par les jeunes gens. Deux des “pirates de l’air” sont tués, quatre autres seront condamnés et exécutés dans un lieu tenu secret, enterrés comme des chiens en pleine campagne. C’est le sujet de ce film présenté à la Berlinale en février.
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https://www.youtube.com/watch?v=6cxsx4wnMnw
Le film est de forme très classique, extrêmement clair dans son récit, haletant dans sa narration, jouant sur des différences de rythmes (des scènes plutôt douces et calmes contrastent notamment avec une scène de mariage et de danse traditionnelle très enlevée). Découpé en trois parties bien distinctes (les préparatifs, le détournement, le procès), le scénario, manifestement très documenté, tente aussi de comprendre, sans asséner de vérités définitives, comment des jeunes gens tout ce qu’il y a de plus calmes, bien élevés, cultivés, et plutôt privilégiés d’une république soviétique, ont pu passer si rapidement à l’action armée.
Leur geste annonce la chute du Mur qui aura lieu six ans plus tard
Bien sûr, le désir de liberté de ces grands ados épris de rock et de cigarettes américaines est l’une des explications les plus évidentes : en 1983, l’URSS vit ses derniers feux, est en train de pourrir sur pied. Le régime ne baisse pas la garde, interdisant toute sortie du territoire, toute entrée de la culture occidentale dans le pays. Le KGB surveille tout. Dans la dernière partie du film, un procureur, mais aussi les parents de ces jeunes gens, ne cessent de le leur reprocher : “Mais vous aviez tout, vous ne manquiez de rien…” Leur geste annonce pourtant la chute du Mur qui aura lieu six ans plus tard.
Parce qu’au-delà de toutes les analyses sociologiques ou psychologiques, au-delà même des faits, si cet événement demeure encore aujourd’hui un traumatisme pour tous les Géorgiens qui l’ont vécu, c’est parce qu’il symbolise plus largement l’agonie des régimes politiques incapables de comprendre leur jeunesse et de lui pardonner ses erreurs, aussi graves soient-elles.
Hostages de Rezo Gigineishvili (Rus., Géorg., Pol., 2017, 1 h 43)
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