L’acteur américain, icône de la jeunesse anti-establishment américaine des années 1960, nous a quittés le 16 août.
“Je sais ce que c’est que d’être mort”, soufflait Peter Fonda aux Beatles, avec qui il prenait du LSD dans la maison que le groupe louait à L.A. en août 1965. Cette phrase, qui sera réutilisée par John Lennon en refrain de She Said She Said sur l’album Revolver, le golden boy alors âgé de 25 ans la prononce en référence à un épisode de son enfance. Le jour de son onzième anniversaire, il se serait lui-même tiré un coup de feu dans le ventre, entraînant une opération chirurgicale durant laquelle il eut le sentiment de passer de vie à trépas plusieurs fois. Les raisons de ce geste, d’un nihilisme extrême et sans doute inconscient, nous pourrions aller les chercher dans la prescience du suicide de sa mère quand il avait 10 ans – suicide qui lui sera dissimulé par son père jusqu’à sa quinzième année. Toujours est-il que ce nihilisme l’accompagnera toute sa vie.
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Drogue, moto, remise en cause de la société de papa
Ce qui frappe lorsqu’on regarde le jeune visage de l’acteur, qui a succombé vendredi 16 août à 79 ans aux complications d’un cancer des poumons, c’est sa beauté d’ange déchu. Peter Fonda n’était pas cramé aux drogues qu’il consommait fréquemment, mais on sentait bien que, malgré sa plastique de golden boy, il ne finirait pas premier de la classe comme sa grande sœur Jane ou son père Henry, avec qui il entretenait d’ailleurs une relation compliquée. Le petit dernier de la dynastie Fonda était un marginal et un rebelle.
Dès ses premiers rôles, il acquiert une solide réputation de jeune acteur prometteur mais dilettante et peu fiable. C’est finalement Roger Corman qui lancera sa carrière au cinéma en lui offrant le rôle d’un rider en quête de liberté dans Les Anges sauvages (1966), titre qui sied à merveille à Peter Fonda. L’acteur y conduit déjà une Harley-Davidson et endosse le costume de défenseur d’une jeunesse anti-establishment. Un an plus tard, il tient le rôle principal de The Trip (1967) du même Roger Corman. Le film est écrit par Jack Nicholson, alors peu connu et autre protégé de Corman. Il raconte le voyage hallucinogène d’un réalisateur de pubs qui vit sous l’effet du LSD et sous l’égide d’un guide interprété par Dennis Hopper.
Drogue, moto, remise en cause de la société de papa, mouvance hippie et improvisations, le trio Fonda/Nicholson/Hopper s’est trouvé autour d’un désir de cinéma commun et se lance dans la réalisation d’Easy Rider (1969) avec seulement 360 000 dollars en poche. Le film en rapporte 60 millions et devient l’emblème du Nouvel Hollywood et le film chéri de la génération Woodstock. La force nihiliste du film renverse le système des studios, Hollywood ne sera plus jamais comme avant. On ne peut d’ailleurs s’empêcher de relever que sa mort coïncide avec la sortie sur les écrans de Once upon a Time… in Hollywood, dans lequel Quentin Tarantino filme précisément ce point de bascule, mais il le fait du point de vue nostalgique de l’establishment. Easy Rider ou Bonnie and Clyde (1967) en sont l’exact opposé.
Ce coup d’éclat constitue le sommet d’une carrière qui se promènera par la suite de seconds rôles en séries B d’action, sans oublier trois réalisations, dont le sublime anti-western L’Homme sans frontières (1971). Au guidon d’une moto, au volant d’une voiture, à cheval comme dans 3 h 10 pour Yuma (2007) de James Mangold ou perché sur une planche de surf, comme dans cette scène ahurissante de Los Angeles 2013 (1996)
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