“I tried to be Grace Kelly/ but all her looks were too sad”, chantait en boucle Mika dans un de ses premiers tubes (Grace Kelly, 2007). Nicole Kidman aurait été bien inspirée d’en tirer enseignement et de ne pas à son tour s’essayer à l’être. Cela lui aurait épargné le très grand embarras d’ajouter un […]
« I tried to be Grace Kelly/ but all her looks were too sad », chantait en boucle Mika dans un de ses premiers tubes (Grace Kelly, 2007). Nicole Kidman aurait été bien inspirée d’en tirer enseignement et de ne pas à son tour s’essayer à l’être. Cela lui aurait épargné le très grand embarras d’ajouter un aussi mauvais film que le Grace de Monaco d’Olivier Dahan à sa filmographie.
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Tout est ridicule dans le film d’Olivier Dahan. D’abord, l’argument, qui s’échine à faire passer la crise franco-monégasque de 1962 – qui vit De Gaulle décréter un blocus à la frontière monégasque (vous l’ignoriez ? un coup d’œil sur Wikipedia suffira) – en séisme politique aussi décisif que l’affaire de la baie des cochons ou l’indépendance de l’Algérie (réplique culte : « l’aéroport de Nice est bloqué !! », balancée dans un important conciliabule à la Principauté avec autant d’emphase que l’annonce d’un bombardement). Ensuite, l’esthétique, entre improbables dîners de têtes (un coup de crayon charbonneux sous l’œil d’une anonyme actrice et voilà Maria Callas ; un gros monsieur de profil avec triple menton : bonjour monsieur Hitchcock…) et film publicitaire ininterrompu pour les chefs d’œuvre de la joaillerie (quand Grace fait un discours, on ne sait plus si la lumière est conçue pour éclairer Nicole Kidman ou ses bijoux). Et même le discours, visant confusément à promouvoir le bien-fondé des paradis fiscaux, le dévouement conjugal plutôt que l’ambition professionnelle et le rayonnement des enclaves monarchiques.
Si on devait sauver quelques dizaines de secondes de cette purge absolue, on garderait les apparitions amusantes de Jeanne Balibar en ambassadrice aristo de la Croix-Rouge, dont les regards en coin et la voix de basse parviennent à imprimer une torsion ironique à tout ce qui l’entoure. Et tout de même une jolie scène ou Grace répète devant sa glace une scène de Marnie d’Hitchcock de trois façons différentes. « Si vous me touchez, j’en mourrai », répète Nicole Kidman, tantôt implorante, tantôt menaçante. L’évidence de sa puissance expressive d’actrice transperce alors fugitivement l’indigeste pâtisserie qui partout ailleurs ensevelit son talent.
Reste la question du film d’ouverture. Ces dernières années, avec Midnight in Paris de Woody Allen ou Moonrise Kingdom de Wes Anderson, cette case historiquement ingrate avait été réévaluée à la hausse. Même le Gatsby de Baz Lhurman l’an dernier déméritait moins. Alors que cette semaine, Godzilla pointe ses crocs sur les salles françaises, que les X-men fomentent leur retour la semaine prochaine dans un film de très bon niveau, on se dit que ces plaisants blockbusters rempliraient mieux l’office d’une ouverture placée du côté du pur entertainment que ce faux cinéma de prestige, époumoné et informe.
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