Lellouche et Niney s’en donnent à cœur joie dans un thriller écolo consternant.
Le hasard des avant-premières nous a conduit à découvrir involontairement ce film dans le cadre du ciné-club Climax, nouveau rendez-vous écologiste lancé par le cinéma Grand Action à Paris. La séance était présentée avec ferveur par Cédric Villani (eh oui).
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Le film se veut une charge contre l’impuissance des responsables politiques face aux lobbies, via l’exemple de la lutte contre un herbicide fictif (la “tétrazine”) dans lequel il n’est pas trop risqué de voir un avatar du glyphosate (même si le glyphosate lui-même est également cité dans l’histoire). Pour rappel, Villani a été jusqu’en 2020 membre d’une majorité à l’écologie discutable, qui a cédé en 2019 à la FNSEA et remis l’interdiction du Roundup aux calendes grecques. Il ne l’a pas quittée à ce moment-là, même s’il l’a fait depuis (pour d’autres raisons), et en profite désormais pour se réactiver sur le dossier. Mais passons.
Foutage de gueule
Disons que tout cela a d’emblée mis la projection sur les rails d’un petit sentiment de foutage de gueule, tant le film, du moins dans son premier tiers, semble presque s’assumer comme une mascarade. Goliath a l’air de ne pas croire en lui-même : il s’astreint à un minimum syndical d’esprit de sérieux mais flirte souvent avec le rire, sans doute à cause de cette manière qu’ont ses interprètes de rechercher une espèce de kitsch dans l’exercice du film de procès, une théâtralité grossière et inutile, donnant parfois l’impression que les acteur·trices parlent en doublage VF et non dans un français normal.
Tout le monde est donc bien content de pouvoir jouer à la dînette-Erin Brockovich, chacun dans sa petite partition de marionnette (le lobbyiste soyeux et duplice, l’avocat alcoolo en costume froissé, la victime revêche à demi-vaincue mais courageuse…), pas forcément pour une gloire de Lindon-movie (malgré beaucoup de points communs avec notamment En guerre) mais plutôt pour l’honnête plaisir de participer à ce cirque, de prendre des airs concernés, d’enfiler avec enthousiasme les gros sabots de la fiction et d’incarner dans sa forme la plus primitive le combat du juste contre le fort (cf. titre).
Pubard et salaud
Pour la subtilité, évidemment, on repassera. Pour la dignité aussi : Tellier filme atrocement, c’est-à-dire, et c’est tout de même une prouesse, à la fois comme un pubard (plans aériens laids et inutiles sur la culture des champs, imagerie populo-rurale faisandée) et comme un salaud (voyeurisme infect pour le corps souffrant et malade sous toutes ses formes : auto-immolation, cancéreux en phase terminale, grévistes de la faim). Sa filmo (L’Affaire SK1, Sauver ou Périr) commence à en tenir une couche en matière d’héroïsme tarte, de combat contre la méchanceté et de manichéisme niveau CM1. Il serait peut-être temps de commencer à se poser des questions de cinéma.
Goliath de Frédéric Tellier en salle le 9 mars
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