En Argentine, de 1976 à 1983, le régime militaire enlevait et assassinait ses opposants. Garage Olimpo décrit la routine des fonctionnaires du mal. Après Buenos Aires vice versa d’Alejandro Agresti, qui évoquait par la bande, sous forme de réminiscences fugitives, la période de la dictature sanglante en Argentine (1976-1983), voici un film qui aborde le […]
En Argentine, de 1976 à 1983, le régime militaire enlevait et assassinait ses opposants. Garage Olimpo décrit la routine des fonctionnaires du mal.
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Après Buenos Aires vice versa d’Alejandro Agresti, qui évoquait par la bande, sous forme de réminiscences fugitives, la période de la dictature sanglante en Argentine (1976-1983), voici un film qui aborde le sujet frontalement. Pendant qu’une jeune terroriste, Ana, pose une bombe chez un officier responsable des « disparitions », une autre, Maria, est arrêtée puis torturée dans le sous-sol du garage Olimpo, une des nombreuses prisons clandestines où la junte militaire a séquestré impunément des dizaines de milliers d’Argentins avant de les liquider.
Garage Olimpo est une œuvre forte, voire édifiante. Et même si on tique un peu à propos de la relation trouble du jeune Felix un des tortionnaires de l’armée avec sa victime, Ana, qui rappelle le sordide Portier de nuit de Liliana Cavani, la mise en scène reste digne. Ni grandiloquent ni complaisant, le film adopte une distance salutaire par rapport à son sujet alors qu’il était facile de tomber dans l’obscène. Il y a tout d’abord, en leitmotiv, les vues aériennes sur Buenos Aires : le point de vue de Dieu, qui pose son regard indifférent sur ces fourmis humaines qui se débattent tout en bas ; mais aussi, et surtout, le point de vue d’un Big Brother virtuel qui surveille implacablement les allées et venues de ses citoyens. Ensuite, il y a la description behavioriste de la violence étatique. On voit des préposés aux enlèvements de gauchistes et à leur torture (principalement à l’électricité) qui, tout en ne réprimant pas leur sadisme naturel, se comportent en fonctionnaires zélés. L’objet le plus surréaliste de cet univers paranazi est la pointeuse où chacun glisse sa carte à l’heure de l’embauche comme un bon ouvrier. Ce dévouement salarié au service (au sévice) du crime en rappelle bien sûr d’autres, dont Adolf Eichmann reste le modèle exemplaire.
Autrement dit, ce film, inspiré de l’expérience vécue par le cinéaste qui a connu les supplices de la junte militaire, est une analyse pénétrante et convaincante du processus fasciste, toujours le même, qui transforme des hommes a priori « comme les autres » en machines dûment assermentées, programmées pour détruire d’autres humains.
L’horreur n’est pas la violence, ni même la torture, mais leur transformation en routine tout à fait ordinaire, voire fastidieuse. Mais cela, la grande théoricienne de la banalité du mal, Hannah Arendt, l’a déjà dit bien avant et bien mieux que moi.
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