Soupe guignolo-gore et subtile autocritique de la série pour ce sixième épisode des aventures de Freddy. Loin de ne concerner que les fans lobotomisés de Freddy ou les amateurs exclusifs de gore au troisième degré, ce sixième épisode des aventures sanglantes du monstre mutant devrait aussi parler à ceux qu’intéressent tout simplement les bons films. […]
Soupe guignolo-gore et subtile autocritique de la série pour ce sixième épisode des aventures de Freddy.
Loin de ne concerner que les fans lobotomisés de Freddy ou les amateurs exclusifs de gore au troisième degré, ce sixième épisode des aventures sanglantes du monstre mutant devrait aussi parler à ceux qu’intéressent tout simplement les bons films. Certes, Freddy sort de la nuit remplit le cahiers des charges imposé par le genre : effets spécieux, hurlements stridulants, hémoglobine dégoulinante, destructions spectaculaires d’un enfer baroque de carton-pâte, explosions en chaîne censées figurer le clou orgasmique de la progression dramatique… Tout le grand guignol habituel qui ne fait plus peur, mais bailler d’ennui. Il faut pourtant passer outre ce décorum superficiel pour apprécier le coeur du film et s’apercevoir que Wes Craven n’est pas le premier tâcheron venu, mais un cinéaste sérieusement allumé. La grande idée de ce sixième Freddy est une construction en abyme permettant à Craven d’inclure sa critique d’une série qui était devenue un phénomène socio-médiatique. Freddy sort de la nuit raconte donc comment les studios New Line démarrent la production de Freddy 6, contactant à cet effet Wes Craven et Heather Langenkamp, vedette du premier Freddy (tout ce joli monde jouant son propre rôle). Problème : l’actrice est désormais mère de famille et ne tient plus spécialement à tourner de film d’horreur, d’autant qu’elle est visitée en songe par Freddy le griffu. Quant à Wes, il est en proie aux mêmes cauchemars récurrents, mais ses doutes sont plus métaphysiques et inquiétants : en tournant un nouveau remake alors que Freddy est mort dans un épisode précédent, il craint de tenter les ténèbres et de ressusciter le monstre mutant, symbole des forces du Mal. Façon de se réapproprier ce Freddy qu’il avait initié et de critiquer la compulsion hollywoodienne qui consiste à ratisser coûte que coûte un filon lucratif. Le film progresse ainsi, mêlant réalité et fiction, spectacle et coulisses, les personnages découvrant le scénario en même temps que les spectateurs. Freddy sort de la nuit s’avère vraiment inquiétant quand on voit le visage habité de Wes Craven, ou quand sa caméra balaye les ombres et recoins d’une chambre d’enfant, fidèle aux principes du hors-champ du grand Jacques Tourneur à une esthétique kantienne dirait Blumenfeld. On relève aussi cette scène extraordinaire où un gosse traverse une autoroute surchargée sous la pluie : belle métaphore de Los Angeles, moloch motorisé prêt à broyer toute part d’innocence et d’humanité en ce monde. C’est quand il remonte le train fantôme des peurs mythiques de l’enfance, quand il ne filme pas Freddy mais nous le laisse deviner, quand il imagine des corridors humides freudiens, que Freddy sort de la nuit nous agrippe et nous fout un peu les jetons. Malheureusement, Wes Craven ne va pas au bout de sa démarche : en nous refourguant quand même, çà et là, la quincaillerie habituelle d’un genre, il finit par livrer un film tiraillé entre détournement et conformité à la série.
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