Lumière d’été. Les frères Larrieu offrent un premier film solaire, libre, au rythme insaisissable. Une bonne surprise. Ce qui frappe avant tout, c’est cette lumière qui appartient à des moments spécifiques de la journée et sur laquelle les frères Larrieu n’ont pas eu envie de tricher. On sent, dans ce cinéma de clairière, un évident […]
Lumière d’été. Les frères Larrieu offrent un premier film solaire, libre, au rythme insaisissable. Une bonne surprise.
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Ce qui frappe avant tout, c’est cette lumière qui appartient à des moments spécifiques de la journée et sur laquelle les frères Larrieu n’ont pas eu envie de tricher. On sent, dans ce cinéma de clairière, un évident plaisir à filmer, une envie de donner à voir l’instant précis, les heures passées à chercher le son juste. Fin d’été est donc un drôle de premier opus régional mais soigné, qui s’évade de Paris pour trouver refuge près de Carcassonne, avec une approche résolument inverse de cet autre film qui traversait récemment la Montagne Noire : Sombre. « Solaire » alors, Fin d’été ? Libre surtout, ne ressemblant à rien de connu, ou si peu : le cinéma du regretté Jacques Davila, les trop secrets Spy Films vidéofilmés par Mathieu Riboulet et Pierre Léon et, bien sûr, l’oeuvre entière de Luc Moullet, convoquée aussi bien pour son art de ramener les montagnes vides à des cachettes d’enfants que pour la tendre moquerie apposée sur les spécimens locaux.
L’idée maîtresse ici étant de faire des films dans la vacance, de prendre littéralement son temps, de trouver la bonne distance entre l’affection et l’ironie douce, de filmer en autochtone décalé. Le scénario est celui d’un retour ou de ce qui fait retour : celui d’Edouard, informaticien au chômage quittant Paris pour finir ce dernier week-end d’août chez ses parents, et y inviter Diane, une Anglaise rohmérienne (elle oublie de mettre une culotte entre deux mémoires de fin d’études). Ils ne sont là que pour passer (lui aimerait mieux pacser) mais occupent leur première soirée dans une communauté tenue par Serge, soixante-huitard local, frère nudiste d’Othon, la toge en moins, la quiquette à l’air en plus. Au terme d’une sangrée (sang poêlé, ail, persil), Serge annonce à Edouard qu’il quitte la région et qu’il lui lègue la maison (et six ados décérébrés avec : chic !). Rester l’automne ou l’éternité, s’ancrer, voilà qui va provoquer autour d’Edouard de sérieux éclaircissements sur les liens qui l’unissent à Serge… entre autres détails, le fait que ce dernier pourrait bien être son père, suite à une partouze d’époque (aujourd’hui, son idée de la révolution sexuelle s’en tient à pisser dans le jardin). Alors, la nature s’assombrit, les nuages arrivent par paquets…
Toute la (haute) respiration de ce film tient dans ce lunatisme d’intersaison : le rythme est insaisissable, fait d’accélérations, de paresses, contemplations, temps morts et vents contraires qui bousculent tout. C’est vraiment un film de frères, en ce qu’il s’accommode de jugements complémentaires et contradictoires : un oeil de peintre d’atelier (les nus de Diane), un autre de peintre de bacchanale, une approche attendrie de l’hédonisme attardé mais sympa des vieux babas, et une autre plus dure de leur inconséquence. On savoure l’instant, puis on le découpe en deux dans un constant tiraillement entre le grave et le léger, l’utopie ou la vie, l’aller et le retour.
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