L’homme de presse a été au centre de nombreux films de cette édition du pléthorique festival canadien. Souvent pour le meilleur, une fois pour le pire.
S’il est toujours illusoire de vouloir dresser une tendance par trop générale du festival de Toronto, où sont présentés chaque année assez de films pour occuper l’année entière d’un cinéphile assidu, ce cru 2019 restera tout de même, pour nous, comme le plus maussade de ces dernières années. La délégation américaine et son cortège de prestige movies, en particulier, n’a pas brillé, ce qui présage une saison des Oscars bien terne.
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Dans cette gueguerre que se mènent les studios, notons que Netflix aligne cette année, enfin, de bons prétendants : Marriage Story de Noah Baumbach, Uncut Gems des frères Safdie (le meilleur film de cette édition et, espérons-le, un sésame pour Adam Sandler) et The Laundromat (et son immarcescible Meryl Streep) de Steven Soderbergh.
Pour l’amour des journalistes
Une thématique s’est cependant affirmée sous nos yeux, au fil des films, dessinant un étrange paradoxe : moins les journalistes semblent capables de peser dans les affaires du monde, laminés par une crise industrielle, affaiblis par la perte de confiance des citoyens, tourneboulés par la révolution de la data et des réseaux sociaux, ou encore, sur une note beaucoup plus anecdotique, ayant de plus en plus de peine à assister aux séances du festival qui nous occupe ici et plus le cinéma, dans un geste forcément romantique, se plaît à leur rendre hommage.
Nombreux furent ainsi les films, notamment américains, avec pour héros un.e journaliste ou dont le scénario était adapté d’un article (parfois les deux). Une tendance qui n’est certes pas neuve, mais qui s’accélère à mesure que les scénarios purement originaux se raréfient.
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Quatre réussites et une catastrophe
Il y a d’abord, naturellement, le journaliste qui dénonce, celui qui enquête ou qui relaie le lanceur d’alerte. Celui-ci est apparu dans deux films filous, Bad Education de Cory Finley et The Laundromat, qui auscultent tous deux avec humour la corruption — d’un proviseur de lycée bourgeois débusqué par une élève pour le premier ; de l’économie mondiale dans son ensemble pour le second (à partir du scandale des Panama Papers).
Sans qu’il s’agisse stricto sensu de journalistes, The Report de Scott Z. Burns (par ailleurs scénariste de The Laundromat) détaille l’enquête d’un fonctionnaire du Sénat pour mettre au jour les pratiques de torture de la CIA dans les guerres du Moyen-Orient.
L’autre cas est le journaliste de proximité, celui qui se charge de révéler les “héros du quotidien”, pour le pire et pour le meilleur.
“A Beautiful Day in the Neighbourhood” : quand le soi-disant feel good laisse un sale goût en bouche
Centré sur Mr. Rogers, figure de la télévision américaine des 60’s aux 80’s, décédé mais aujourd’hui adulé par les progressistes en souffrance de Trump, A Beautiful Day in the Neighbourhood (avec Tom Hanks) appartient à la première catégorie : un sommet d’infantilisation et de niaiserie, où le désir de safe (un monde tout doux, rassurant) vient annihiler l’esprit critique d’un journaliste évidemment cynique. Quand le soi-disant feel good laisse un sale goût en bouche.
The Friend, en revanche, tire le meilleur de son article écrit pour Esquire en 2013, sur un jeune homme un peu paumé (Jason Segel, sublime) qui donna tout son temps et son amitié à un couple d’amis en difficulté à la suite d’un cancer (Casey Affleck et Dakota Johnson). Mélo sur le fil, rappelant l’immense Manchester by the Sea, le premier film de Gabriela Cowperthwaite sera à surveiller quand il sortira (s’il sort).
Festival de Toronto Du 5 au 15 septembre
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