Festival de La RochelleEmilio Ghione, tout d’abord, qui réalise entre 1917 et 1924, une série de moyens métrages curieux. Très proche dans l’esprit des œuvres de Feuillade, mais moins maîtrisé narrativement et plastiquement, Les Souris grises est un document passionnant sur le cinéma-feuilleton italien des origines. Ghione y crée Za-la-mort, un personnage d’”apache urbain” ambivalent […]
Festival de La Rochelle
Emilio Ghione, tout d’abord, qui réalise entre 1917 et 1924, une série de moyens métrages curieux. Très proche dans l’esprit des œuvres de Feuillade, mais moins maîtrisé narrativement et plastiquement, Les Souris grises est un document passionnant sur le cinéma-feuilleton italien des origines. Ghione y crée Za-la-mort, un personnage d' »apache urbain » ambivalent tiraillé entre sa vie de famille (près de sa femme Za-la-vie)
et sa haine pour la redoutable bande des Souris grises… Ghione balade sa silhouette longiligne et inquiétante affublée d’une énorme casquette, baignant dans les milieux interlopes des taudis et des bandes rivales. Le grand intérêt de cette série, c’est cette hallucinante débauche narrative, ces multiples invraisemblances de
scénarios, qui n’ont rien à envier au feuilleton populaire de la fin du xixe siècle. Immense succès populaire à sa sortie, le film n’a été que très récemment restauré par la Cinémathèque de Bologne c’est donc une vraie redécouverte.
La Cinémathèque de Bologne était d’ailleurs à l’honneur cette année puisqu’un hommage était rendu à son président Giuseppe Bertolucci, le petit frère de Bernardo qui, depuis la fin des années 70, a réalisé une grosse dizaine de films très inégaux mais, pour certains, passionnants. D’abord assistant de son frère sur La Stratégie de l’araignée, puis coscénariste du Dernier tango, Giuseppe réalise en 1977 son premier film, le plus célèbre, Berlinguer ti voglio bene, qui lance Roberto Begnini. Mais bien plus que ce film culte qui a mal vieilli, retenons dans la carrière en dents de scie de Bertolucci deux films magnifiques, Segreti segreti et Amori in corso. Le premier est sans doute l’une des premières tentatives de revenir en Italie sur les années 70, années du terrorisme et de la stratégie de la tension. Mais Bertolucci ne cède jamais au didactisme ou à la psychologie facile et joue plutôt sur les tensions subtiles et assez peu politiques entre ses personnages. Il met en scène un univers presque exclusivement féminin en s’entourant (c’est une constante de son cinéma, qui, selon nous, en fait le prix) d’actrices magnifiques, de Lina Sastri à Stefania Sandrelli, de Lea Massari à son actrice fétiche Alida Valli, admirable. Amori in corso, son chef-d’œuvre, est un film beaucoup plus simple aux tonalités quasi rohmériennes, sorte de huis clos campagnard entre deux jeunes filles. On aimerait revenir plus longuement sur ce cinéma délicat et intimiste, tiraillé entre des tentations expérimentales et la recherche d’un classicisme contemporain. Espérons qu’un jour un distributeur aura le courage de présenter ces films qui, à une exception près, n’ont jamais été distribués en France.
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