Premier week-end passé sur les planches normandes et déjà de belles réussites. La dramédie « Puzzle » portée par l’irrésistible Kelly Macdonald et « Nancy » avec Andrea Riseborough.
On voit à Deauville une facette du cinéma américain qu’on ne voit pas tellement ailleurs. Sauf à aller au festival de Sundance bien-sûr. Mais pour le cinéphile européen, Deauville permet de découvrir un certain ordinaire du cinéma d’auteur américain.
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Cette classe comporte des films pas tout à fait assez spectaculaires dans leurs recherches formelles pour connaître une sélection a Cannes, Venise ou a Locarno – même si chaque année la compétition reprend un ou deux films découverts a Cannes, The Rider de Chloé Zhao l’an dernier, Leave No Trace de Debra Granik cette année. Et pas souvent aussi pas tout à fait assez armés (en terme de casting, de budget, de reconnaissance critique associée a leur auteur) pour connaître une large distribution internationale. Il y a donc une vraie curiosité à découvrir cette forêt cachée de films d’auteurs américains. D’autant plus que ce milieu de panier n’en comporte pas moins de belles réussites et, en seulement deux jours, la compétition a déjà offert au moins deux films vraiment bons.
L’irrésistible Kelly Macdonald dans Puzzle
Le premier s’intitule Puzzle et pourrait être qualifié de dramédie, tant les germes de drôleries ne s’y développent qu’innervés d’une sève puissamment mélancolique. Une telle imbrication entre des situations fantasques et une langueur chagrinée qui les enveloppe évoque immanquablement le maître en matière de contrastes et de richesse de nuancier : le grand James L. Brooks (Comment savoir, Tendres passions). Ce second film de Marc Turtletaub (le premier, Gods Behaving Badly, est inédit en France), raconte l’émancipation d’une mère de famille quadra grâce à la pratique du puzzle.
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Dans sa passion subite pour assembler des pièces, elle entrevoit le nouveau dessin que pourrait figurer sa vie. Avec ou sans son mari. A New-York ou ailleurs. Le film séduit par l’affection débordante qu’inspire son personnage (et l’irrésistible Kelly Macdonald qui interprète y est pour beaucoup), les liens d’empathie qu’il noue entre ses personnages affolés et les spectateurs séduits. Il part donc avec de bonnes chances pour le prix de public.
La bonne surprise Nancy et l’incroyable densité de Tye Sheridan
L’autre bon film de ce premier week-end normand s’appelle Nancy et relate l’itinéraire d’une jeune femme faiblement socialisée, qui perd sa mère malade et va s’inventer une filiation romanesque auprès d’un couple de bourgeois cultivé dont la fillette a disparu trente ans plus tôt. Ce premier film de Christina Choe cerne avec une grande précision clinique – et néanmoins aimante – des tempêtes intérieures d’une violence insensée qui se rétractent sous une apparence placide. Nancy souffre mais n’exprime cette souffrance que par l’invention de récits qui la soignent du manque d’amour. Croire elle-même aux fictions qu’elle invente et la condition de sa survie. Extrêmement tenu dans sa mise en scène, le film impressionne aussi par son interprète principale, l’étonnante Andrea Riseborough au physique étrange de jeune Shelley Duvall.
La puissance d’un acteur, c’est ce qu’on retient de Friday’s Child, réalisé par un ancien assistant de Terrence Malick, A.J Edwards et produit par Gus Van Sant. Le film est stylé, presque trop et de façon trop redevable aux styles respectifs de deux mentors pré-cités. Et le parcours de ce jeune homme devenu inopinément meurtrier atteint à une certaine intensité essentiellement par la densité insensée de son jeune interprète, Tye Sheridan. Découvert enfant chez Malick (The Tree of Life) et Jeff Nichols (Mud), aux antipodes ici de son numéro virevoltant de grand ado spielbergien dans Ready Player One, l’acteur de 21 ans est assurément un des comédiens les plus passionnants du moment.
L’hommage à Elle Fanning
Comme Elle Fanning. Qui est encore plus jeune. A à peine 20 ans, alors même qu’on l’adore depuis dix ou douze ans. La petite fille amoureuse du frippé Benjamin Button, la teen malicieuse de Super 8, l’égérie des Coppola père et fille (Somewhere, Twixt, Les Proies…) recevait ce week-end à Deauville un prix pour l’ensemble de sa carrière. Après un discours hommage tonitruant de drôlerie de Rebecca Zlotowski (conclu par un » … cette drôle de joie, ce don du ciel qui la rend belle, Elle l’a, Elle l’a« ), la jeune fille, joliment coiffée de couettes, a récupéré son trophée en faisant preuve d’un charme irrésistible. Un charme que n’altère pas le film pourtant très faible de Mélanie Laurent qui suivait la cérémonie. On reviendra lors de sa sortie le 10 octobre prochain sur ce film noir tourné aux USA d’après un roman de Nic Pizzolatto (True Detective).
Dans les prochains jours, la compétition se poursuit avec certains films très attendus comme Blindspotting de Carlos Lopez Estrada, un hommage à Jacques Audiard et la présentation de son western avec Joaquin Phoenix, la venue de Sarah Jessica Parker… De tout ça, entre autres, on se reparle dans quelques jours.
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