Jean-Paul Civeyrac en fantôme de Murnau, un regard percutant sur les cités et un beau film sur la distanciation : vive la cité du Che. Il est plutôt réjouissant de voir qu’au terme d’une sélection globalement intéressante, les films que nous distinguons au sein de notre palmarès personnel sont ceux qui ont été récompensés par […]
Jean-Paul Civeyrac en fantôme de Murnau, un regard percutant sur les cités et un beau film sur la distanciation : vive la cité du Che.
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Il est plutôt réjouissant de voir qu’au terme d’une sélection globalement intéressante, les films que nous distinguons au sein de notre palmarès personnel sont ceux qui ont été récompensés par le jury 2001 du Festival de Belfort.
Fantômes de Jean-Paul Civeyrac laisse en tête des images fortes qui font se jouer en parallèle et en écho les unes aux autres des histoires d’amour et de mort, de contamination et de possession, de disparition et de résistance. Une rumeur circule : des gens disparaissent, sans que l’on sache pourquoi. Une fille aurait le pouvoir, en faisant l’amour, de protéger ses partenaires de cette mystérieuse extinction. D’autres ont le pouvoir de faire renaître les morts, comme cette jeune femme qui fait revenir auprès d’elle son compagnon tué dans un accident de moto. Cela donne lieu à l’une des plus belles scènes du film où la jeune femme, refusant le départ de ce fantôme ressuscité par la chair, l’attache à elle avec une corde. Le désir, envisagé en tant que puissance fantastique et donc cinématographique, soumet les corps à l’épreuve de l’image en tant que support incantatoire, lieu de survivance et de perdition.
Si ces histoires de fantômes ne semblent pas toujours trouver un parfait équilibre dans le tout qu’elles forment, elles n’en dégagent pas moins un magnétisme troublant qui s’affirme dès les premiers plans du film, ne serait-ce que dans les scènes d’attente des personnages aux fenêtres. On pense alors à Murnau, c’est plutôt bon signe.
Wesh, Wesh qu’est-ce qui se passe ? a su également marquer les esprits. Rabah Ameuh-Zaïmeche, réalisateur et acteur du film, pose sur la cité le regard le plus juste et le plus percutant que le cinéma ait produit jusqu’ici. Proche de ses personnages, il sait maintenir à leur égard une distance suffisante pour laisser place au respect et à la pudeur, bannir la moindre fascination pour la violence et le moindre jugement, et réussit ainsi, aidé d’un sens du rythme impressionnant pour un premier film, à maintenir dans une ligne fictive tout l’impact d’un documentaire.
La satisfaction aurait été complète si la présence en compétition de Sophie est partie pour six mois, film allemand d’Angela Schanelec, avait été soulignée par un prix. Le temps d’un départ, des trentenaires plutôt dépressifs se croisent, se parlent comme ils monologueraient, se posent des questions sur leur vie et attendent. Ce qui empêche le film de tomber dans un nombrilisme poseur, c’est le refus de la réalisatrice de coller au mal-être de ses personnages et de s’impliquer dans leurs histoires, qui ne sont livrées ici que par bribes. Elle préfère les laisser flotter dans une belle abstraction, révélatrice de leur rapport au temps. Jamais vraiment dans la narration, ni complètement installée dans la distanciation, elle tisse un beau film sur la transition.
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