Hitler, Staline, Mussolini et Churchill conversent en deepfake au purgatoire… Mais pour nous dire quoi ?
Le Russe Alexandre Sokourov avait consacré trois films de fiction à des dirigeants totalitaires du XXe siècle : Moloch, en 1999, mettait en scène Hitler, Taurus (2001), Lénine, et Le Soleil (2005), l’empereur Hirohito. Fairytale (“conte de fées”, titre évidemment ironique, voire cynique) semble jaillir de la même veine.
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De la nuit se lèvent des morts, des fantômes. Staline, dans son tombeau, parle à son voisin, Jésus en personne… Dans une forme impressionnante et extrêmement stylisée, graphique, quasi expérimentale, Sokourov ressuscite des figures de la Seconde Guerre mondiale à partir d’images d’archives réelles retravaillées numériquement. On voit donc Staline, mais aussi Hitler, Churchill et Mussolini.
Comme tout film parle de son époque, “Fairytale” parle forcément aussi de Poutine
Pour corser le tout, chacun a trois ou quatre incarnations de lui-même, des clones (on voit Hitler en uniforme, en costume de ville, etc.) qui se parlent parfois entre eux. Dans un décor en noir et blanc cauchemardesque, couvert de morts gémissants sur qui tombe une nuit qui sent la mort, les quatre (et donc seize) hommes de pouvoir s’opposent, se moquent les uns des autres, se surveillent, se haïssent.
Fairytale rappelle aussi un autre film russe, le dernier d’Alexeï Guerman, sorti en 2013, Il est difficile d’être un dieu, où toutes les horreurs et humeurs humaines suintaient, coulaient de partout dans un noir et blanc hystérique. Une farce macabre, dans une même vision totalement désespérée de l’humanité.
Que dit le film ? À vrai dire, il plonge dans un tel état hypnotique et d’épouvante que son sens en devient difficile à saisir. Comme tout film parle de son époque, Fairytale parle forcément aussi de Poutine. Mais le message semble si sibyllin qu’il nous laisse un peu dubitatif·ves.
Fairytale d’Alexandre Sokourov (Rus., 2022, 1 h 18). En salle le 10 mai.
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