La parabole d’Adam McKay sur l’inaction politique face à la crise climatique est une satire convenue voire très autosatisfaite, et pas bien drôle.
Si l’espèce de grande purge satirique débordant de clins d’œil contemporains de Don’t Look Up inspire un sentiment de déjà-vu, ce n’est pas forcément (ou pas seulement) à cause desdits clins d’œil, mais est peut-être aussi dû à l’exercice lui-même : une espèce de convocation narquoise, apocalyptique et fourre-tout du temps présent, surjouant la négativité désabusée, que Netflix est en train d’instituer en rendez-vous incontournable de fin d’année un an après Death to 2020 et quelques jours avant sa “suite”, Death to 2021.
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On trouvera donc désormais à côté (et sûrement bientôt à la place) d’Astérix, de Louis de Funès et des rom-coms de Noël ces programme au cynisme ostentatoire et convenu, rassemblant tout ce que l’année écoulée a standardisé en matière de sujets d’indignation : gourous climatosceptiques, dirigeants trumpoïdes, internautes conspirationnistes et influenceurs écervelés, jouant doctement leur rôle de caricatures pour le compte d’un public qui se console de la fin du monde en faisant mine d’apprécier au moins le spectacle.
Quelques touches d’humour réussies
Ici c’est donc l’irruption céleste d’un astéroïde filant droit vers la Terre qui vient jouer le rôle de déclencheur eschatologique, actionnant une série de réactions ou plutôt de non-réactions politiques (en toute post-vérité, la Maison-Blanche oscille entre déni total et instrumentalisation), médiatiques (les scientifiques à l’origine de la découverte deviennent des mèmes, des stars, des cibles de harcèlement ou tout ça à la fois) et capitalistiques (un milliardaire de la tech entreprend l’exploitation minière de l’astéroïde).
Le programme est parsemé d’un certain nombre de trouvailles comiques parfois vraiment drôles, comme ce vieux militaire grincheux et très populaire joué par Ron Perlman, offrant à l’Amérique son sacrifice inutile (à part pour le récit officiel, et donc pour les intentions de vote), et le spectacle rassurant de sa rudesse texane (“Eenvoyez cette fusée, bordel, j’ai pas toute la journée !”). Une parodie assumée d’Armageddon et de ses héros dont le prétendu bon sens texan partait sauver le monde d’une menace identique en l’échange de quelques P.V. annulés.
Banalité confortable
Mais toutes les mauvaises comédies réussissent tout de même une poignée de blagues. Les quelques rires qu’accroche Don’t Look Up ne changent pas sa nature profonde, que trahit un robinet de banalités faussement sarcastiques : des scientifiques qui savent et des dirigeants qui ignorent, des masses qu’on endoctrine et qu’on zombifie, à coup de smartphones et de vidéos de chat.
Rien de tout cela n’a vraiment vocation à bousculer par le rire ou l’angoisse quelque vision du monde que ce soit : on est plutôt au contraire dans quelque chose d’extrêmement balisé et tranquillisant, une cartographie inerte de la stupidité humaine tout juste apte à exciter le boomer satisfait qui aura sûrement le sentiment d’attraper la queue de Mickey au moment où – eurêka ! – il comprendra soudain quelle subtile métaphore se cache derrière cette histoire d’astéroïde.
Don’t Look Up : Déni cosmique d’Adam McKay, avec Leonardo DiCaprio, Jennifer Lawrence, Cate Blanchett, Mark Rylance, Meryl Streep, Timothée Chalamet… Disponible sur Netflix.
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