Le réalisateur des Apprentis creuse avec un bonheur inégal son sillon de comédie sophistiquée à la française.
Il y a chez Pierre Salvadori une forme d’héroïsme qui, à défaut d’entraîner l’admiration, force le respect.
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Une façon de se tenir droit, vaille que vaille, sur le champ de ruine de la comédie française, une volonté d’occuper le milieu sans s’y vautrer, un attachement à une forme de classicisme un peu désuet, pas toujours drôle, mais d’une élégance presque sans faille.
Appelons cela la “Lubitsch french touch”, art mineur et néanmoins charmant, autant que peuvent l’être un couscous norvégien ou une reprise des Beach Boys à la flûte de pan : le genre de petit plaisir qu’on ne se refuse pas.
Après les hôtels de luxe de la Riviera dans Hors de prix, direction le port de Marseille et ses salons de coiffure, avec à nouveau Amélie Tautou au volant (en coiffeuse chipie), Sami Bouajila à la place du mort (en factotum romantique, comme toujours très classe) et Nathalie Baye sur la banquette arrière (maman zinzin en plein retour de libido, rôle attendu mais très plaisant).
Inutile de résumer un film qui tire son principe de plaisir d’infinis quiproquos, malentendus et jeux de dupe ; il suffit d’en rappeler le titre programmatique : De vrais mensonges, ou la rhétorique bien connue du vrai fleurissant sur le faux.
On sait la frontière ténue entre la vulgarité du boulevard et le crépitement de la comédie champagnisée : c’est la mise en scène qui, seule, est capable de la tracer. Or Salvadori est sans doute le seul aujourd’hui capable, dans un cadre grand public, de dessiner une telle ligne blanche, que son petit véhicule comique jamais ne dépasse.
Il faudrait certes, pour apprécier tout à fait le film, accepter l’équation Tautou + coiffeuse = idéal de féminité, faire abstraction de la soupe musicale et passer outre une direction artistique désastreuse qui rappelle immanquablement Plus belle la vie.
Pourtant, malgré cet habillage ingrat, davantage Twingo tunée que Mercedes racée, jamais l’auteur des Apprentis ne cède à la facilité, affichant une belle croyance dans les puissances du cinéma, comme dans cette scène, magnifique, de théâtre en ombre chinoise où la cruauté de la révélation s’efface devant la noblesse du spectacle.
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