Quand Imamura mourra, le paysage humaniste du cinéma japonais se trouvera bien nu. Il ne faut évidemment pas être leurré par l’apparent carte-postalisme folklorique, option haïku, que recèle le titre de son dernier film, De l’eau tiède sous un pont rouge. Foin de cerisiers en fleurs sur fond de Fuji Yama. Le pont rouge en […]
Quand Imamura mourra, le paysage humaniste du cinéma japonais se trouvera bien nu. Il ne faut évidemment pas être leurré par l’apparent carte-postalisme folklorique, option haïku, que recèle le titre de son dernier film, De l’eau tiède sous un pont rouge. Foin de cerisiers en fleurs sur fond de Fuji Yama. Le pont rouge en question, repère de la demeure de l’héroïne, Saeko (exquise Misa Shimizu), pourrait être l’équivalent des lanternes signalant autrefois les bordels, bien que cette fois il n’y ait pas l’ombre d’une péripatéticienne ? registre dans lequel Imamura a déjà beaucoup donné. Mais Saeko est une chaude lapine, et le sexe est évidemment le moteur de cette fable. D’où « l’eau tiède », que Saeko émet par hectolitres lorsqu’elle jouit ; on pourra gloser à l’envi sur la métaphore utérine, matricielle que représente ce personnage de femme-poisson (au sens astrologique), déesse marine ou lacustre de la fertilité résidant dans un petit port de pêche. La mère, la mer, sources inépuisables de vie Mais plus intéressante est la construction du film dans son ensemble, la distribution spatiale de ce récit où Imamura met en sourdine le « carnavalesque bouffon » de ses grands spectacles épiques (style Eijanika) pour narrer une chronique villageoise à l’humour bon enfant, aussi fordien que tatiesque.
De l’eau tiède est une œuvre fluide et limpide qui reste constamment sur le terrain du réalisme quotidien. L’émission de torrents de liquide par l’héroïne ne procède d’aucun effet spécial visible, ne donne lieu à aucune emphase stylistique. Le phénomène reste organique au film (et au personnage, naturellement) et ne constitue pas réellement le clou du spectacle. Sous ses dehors de trublion, de vieux galopin égrillard, Imamura est un vrai sage. Un des derniers.
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