Aussi surfabriqué qu’Etat des lieux était brut de décoffrage (avec son noir et blanc granuleux et son filmage à l’énergie), De l’amour en est pourtant très proche. Si les moyens et la cible commerciale ont changé, Richet continue de se poser entre spectacle et politique, John Carpenter et Dziga Vertov (Vertov, c’est lui qui le […]
Aussi surfabriqué qu’Etat des lieux était brut de décoffrage (avec son noir et blanc granuleux et son filmage à l’énergie), De l’amour en est pourtant très proche. Si les moyens et la cible commerciale ont changé, Richet continue de se poser entre spectacle et politique, John Carpenter et Dziga Vertov (Vertov, c’est lui qui le dit, j’ai mes doutes’), fascination pour les images et leur critique virulente. D’ou un autre risque : le « coup des degrés », ou la tentation critique bien connue de justifier coûte que coûte quelques grosses naïvetés et autres clichés par leur retournement réflexif. « Au premier degré » (comme s’il pouvait y en avoir un second et des suivants !), De l’amour est un roman-photo banlieusard, avec jeune première jolie et énervante, jeune premier qui n’assure pas complètement mais bien décidé à faire des progrès, et comparses folkloriques : une beurette forte femme, un gros sympa à chien méchant, un genre d’Anelka en voie d’amendement, un bon flic et un mauvais flic. « Au second degré » (bof ), ce petit théâtre télévisuel deviendrait soudain brechtien, et De l’amour une méditation médiologique quant à la prégnance des clichés.
Le problème du film est qu’il est tout ça, mais à la fois, tout en un, à prendre ou à laisser (on prend !), pas si éloigné d’un Brisseau, et sans la distance et les pincettes de tout petit malin qu’aurait adoptées un metteur en scène moins sincère que Richet. Lui croit assez en la puissance du cinéma pour orchestrer un mélodrame qui contiendrait naturellement sa part de critique et de catharsis. D’abord agréable et gonflé quand il invente un mélange de sitcom et d’incarnation, dans lequel les personnages oscillent entre leur irréductibilité et le poids de leur représentation sociale et culturelle (comme tout un chacun, banlieusards ou pas, seuls les codes diffèrent), De l’amour se fait plus agaçant quand la mise en scène s’exhibe, avec tous ces plans qui ne sauraient commencer que par un mouvement de caméra plus ou moins discret. Si Richet développe son récit avec beaucoup de fluidité, il met un peu trop de temps à préparer le retournement du film, après le viol de Maria par le flic immonde, qui passe sans crier gare de la chronique des événements amoureux à un final paroxystique.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
{"type":"Banniere-Basse"}