Cet anime confirme tout le bien que l’on avait pensé de Sunao Katabuchi, cinéaste rare (trois longs métrages en dix-sept ans), lors de la vision de son Mai Mai Miracle (2009). On y retrouve les mêmes qualités : goût pour le passé historique et sens aigu du quotidien. Des penchants exacerbés dans cette œuvre proche, en moins […]
Superbe anime, à la fois doux et déchirant, sur le quotidien d’une famille de la région d’Hiroshima en 1945.
Cet anime confirme tout le bien que l’on avait pensé de Sunao Katabuchi, cinéaste rare (trois longs métrages en dix-sept ans), lors de la vision de son Mai Mai Miracle (2009). On y retrouve les mêmes qualités : goût pour le passé historique et sens aigu du quotidien. Des penchants exacerbés dans cette œuvre proche, en moins mélodramatique, du Tombeau des lucioles d’Isao Takahata, ex-mentor de Katabuchi.
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Dans un recoin de ce monde narre quinze ans de la vie de Suzu Urano, jeune femme d’Hiroshima, avant et après son mariage à 18 ans et son installation dans la ville proche de Kure. Tiré d’un manga de Fumiyo Kouno, on y voit la vie quotidienne d’une famille (celle du mari de Suzu) pendant la Seconde Guerre mondiale, moment clé dans l’histoire du Japon, pilonné sans merci par l’aviation US puis dévasté par deux bombes atomiques.
La beauté du film, plus ligne claire que jamais (option miyazakienne), aux personnages d’apparence juvénile (Suzu semble toujours avoir 10 ans), tient à la manière dont Katabuchi intègre le drame de la guerre au quotidien. Réputé pour les intenses recherches documentaires qu’il effectue avant de réaliser ses films, le cinéaste s’attache non seulement à restituer les événements et les lieux exacts, mais il décrit par le menu la vie ordinaire de ses personnages – comme les expédients qui leur permettent de pallier les privations alimentaires. Le résultat est édifiant : même les films en images réelles ne sont jamais aussi précis sur les détails de la vie d’une maisonnée.
C’est aussi un drame romanesque dans la lignée de Naruse, un shomingeki où, malgré le poids du quotidien, la psychologie et les sentiments ne sont pas en reste. Si cette insistance sur la survie de la famille et ses modalités quotidiennes dilue un peu l’horreur de la guerre, cela n’empêche pas un événement déchirant de survenir – qu’on ne révélera pas. Quant à la bombe A qui pulvérise Hiroshima, c’est un peu la cerise infernale sur ce gâteau amer : un épiphénomène au sein d’un plus vaste drame humain. Ce petit chef-d’œuvre de l’anime offre la description la plus complète et vivante d’un microcosme humain dans un lieu précis (le sud du Japon) à une période donnée (entre 1933 et 1945). Sans nul doute le meilleur anime de l’ère post-Miyazaki.
Dans un recoin de ce monde de Sunao Katabuchi (Jap., 2016, 2 h 08)
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