La chronique douce-amère d’un village situé à l’extrême nord de la Russie. Une sorte de kolkhoze (ou d’ex-kolkhoze ?), géré par le débonnaire Tchapourine, qui veille sur ses administrés comme sur ses propres enfants. En dehors des personnages et du récit, ce qui impressionne c’est la qualité photographique et documentaire du film, qui fait que […]
La chronique douce-amère d’un village situé à l’extrême nord de la Russie. Une sorte de kolkhoze (ou d’ex-kolkhoze ?), géré par le débonnaire Tchapourine, qui veille sur ses administrés comme sur ses propres enfants. En dehors des personnages et du récit, ce qui impressionne c’est la qualité photographique et documentaire du film, qui fait que toutes les micro-fictions qui l’émaillent les hauts et les bas de la vie des uns et des autres semblent de simples ajouts, des vignettes destinées à nous faire ressentir émotionnellement ce que le paysage, les maisons en bois, les costumes, les visages typés (nordiques et burinés) suggèrent déjà. Il ne s’agit pourtant pas d’une geste savante à la Paradjanov. On est plus proche de l’humanisme de Pagnol ou de Ford. Simple tableau de la vie de quelques paysans pauvres, décimés par l’alcool, mais heureux, le film de Lydia Bobrova reste au ras du vécu, relatant les conflits des uns et des autres, les moments festifs (naissances, anniversaires, célébration du diplôme d’une fille), les deuils, les maladies, les accidents… Ça ne vole pas très haut, mais ça reste poétique en évitant le pittoresque grâce à une certaine distance, une retenue bienvenue dans le filmage.
Les activités quotidiennes du village sont harmonieusement intégrées aux différentes intrigues : les problèmes de Skouridine, brave paysan pris en tenaille entre sa femme et sa belle-mère ; les quatre cents coups des trois poivrots du village ; la mère qui cherche un mari pour sa fille, etc. Le tout est scandé régulièrement par des plans de nature qui font ressentir le passage du temps et des saisons de la neige hivernale au soleil estival. On ne nage pas dans le drame, mais il n’y a pas non plus de mièvrerie ni de complaisance. En témoignent certaines ellipses abruptes. Quand le poivrot Zaïka se pointe au repas d’anniversaire d’une de ses voisines pour boire un coup à l’œil, tout le monde chante, l’ambiance est lyrique. Scène suivante : l’enterrement du même Zaïka, mort de ses libations excessives. C’est élémentaire, joliment trivial, naturel. La femme de Tchapourine regarde Santa Barbara à la télé pendant que son mari fait la liste des habitants du village morts d’alcoolisme. « Va écrire tes conneries à la cuisine ! », dit l’épouse. No comment. Lydia Bobrova ne révolutionne rien, mais on aimerait voir plus souvent de ces petits films bien sentis, sans prétention artistique démesurée.
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