Longtemps, dans la critique cinéphile, préférer le tout-venant des productions hollywoodiennes à la supposée liberté du cinéma dit indépendant était une option possible. La machine hollywoodienne, tournant à plein régime, pouvait accoucher, parfois même par accident, de films d’une grande élaboration conceptuelle, où le formatage et l’innovation trouvaient souvent un miraculeux point d’équilibre. S’il y […]
Longtemps, dans la critique cinéphile, préférer le tout-venant des productions hollywoodiennes à la supposée liberté du cinéma dit indépendant était une option possible. La machine hollywoodienne, tournant à plein régime, pouvait accoucher, parfois même par accident, de films d’une grande élaboration conceptuelle, où le formatage et l’innovation trouvaient souvent un miraculeux point d’équilibre.
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S’il y a aujourd’hui une crise à Hollywood, elle tient d’abord à l’usure de cette croyance. Même les acteurs les plus influents de cette sphère, ceux qui chaque été affrètent les plus gros bolides partant à l’assaut du box-office, s’en rendent compte. Le plus grand danger qui cerne Hollywood n’est donc pas le piratage massif des blockbusters sur internet ou la baisse de la fréquentation mais un certain désenchantement ou désintérêt artisanal pour les produits finis de ceux qui pilotent aujourd’hui la machine.
Economiquement, Hollywood a déjà survécu à des crises plus violentes, s’est remis par exemple de façon spectaculaire du séisme des années 60 (lorsque l’aspirateur télévisuel vidait massivement les salles). Et on voit bien comment déjà le business du cinéma familial d’animation a successivement dompté la figuration numérique puis la 3D pour se réinventer et préserver, voire accentuer, sa position de domination.
Ce qui se dégage de l’enquête de Jacky Goldberg (les Inrocks n° 865, en kiosque), qui s’est immergé quinze jours durant dans la vie des grands studios, n’est pas une inquiétude sur la possibilité de trouver des solutions à une érosion des entrées possiblement passagère. La menace vient plutôt des conséquences artistiques des solutions mises en oeuvre : acclimatation des méthodes de Wall Street à celles d’Hollywood, examen des scénarios par des algorithmes élaborés pour en tester la rentabilité…
Le culte monomaniaque des franchises qu’on reboote tous les dix ans pour relancer leur exploitation est le symptôme le plus criant des réticences des majors à prendre le moindre risque. Mais on veut croire que la capacité à faire croître les herbes folles de la créativité dans les pelouses artificielles de la rationalité économique et des contraintes les plus astreignantes est la marque inoxydable du cinéma hollywoodien et que, à la veille d’un nouveau Batman qui s’annonce passionnant, il n’y a donc pas lieu de se désoler trop tôt.
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