Après celui de Miyazaki, c’est le grand retour de Takahata avec une splendide adaptation d’un conte libertaire du Moyen-âge.
Bien moins prolifique qu’Hayao Miyazaki, son associé au sein
du studio Ghibli, Isao Takahata revient à la réalisation après une éclipse de quinze ans. Si dans son précédent film, Mes voisins les Yamada, il brocardait avec poésie les citadins modernes, cette fois il illustre un conte du Xe siècle écrit par une courtisane impériale, Murasaki Shikibu.
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Un modeste coupeur de bambous trouve un nouveau-né dans une pousse et, avec sa femme, il a l’intuition du destin prestigieux de cet être quasi surnaturel… Grâce à une fortune providentielle découverte dans le même bois de bambous, l’homme pourra réaliser ce vœu. Mais avant, la future princesse vivra la vie libre et buissonnière d’un enfant de la campagne…
Si Le Conte de la princesse Kaguya est le film le plus moralement et politiquement correct du cinéaste, prônant le libre arbitre au détriment des diktats sociaux, donc d’une certaine manière à l’encontre des valeurs traditionnelles nipponnes, il se singularise par son style et son ton.
Takahata qui, rappelons-le, n’est pas dessinateur lui-même et change souvent de style visuel, s’est affranchi depuis longtemps des rigueurs de la ligne claire que Miyazaki a continué à cultiver jusque dans son dernier film (Le vent se lève). Ici, un peu comme dans Mes voisins les Yamada, Takahata a opté pour un tracé d’esquisse, irrégulier et crayonné, et des couleurs à l’aquarelle, qui confèrent de la légèreté au dessin, et donc au récit. Cette décontraction formelle est au diapason du ludisme et du rapport à la nature de la future princesse et de ses compagnons de jeu.
A ce vert paradis des distractions enfantines, on oppose la rigueur de la haute société, la vie de palais et les rituels millimétrés, infligés à la princesse qui cesse de s’appartenir pour devenir une icône. Elle est, in fine, l’instrument de l’ascension sociale, style Bourgeois gentilhomme, du coupeur de bambous. Mais Takahata n’est nullement manichéen. Il sait célébrer également les splendeurs de la civilisation. Mais cet univers de beauté, de libertés ou de contraintes, est oblitéré par une fatalité transcendantale, que le cinéaste exprime avec une poésie infinie mêlée d’amertume.
Car Le Conte de la princesse Kaguya n’est pas une simple fable pour enfants, mais une œuvre philosophique à plusieurs niveaux. Comme Le Tombeau des lucioles, il traite de la mort, mais sur un mode presque surréel. La fable mélancolique conserve de bout en bout une grâce et une légèreté euphorisantes.
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