Sujet risqué, finement négocié, dans une comédie grave sur le désir de paternité chez les gays.
Quand certaines comédies sociales de la marge se piquent d’agacer la pensée dominante, mais où tout finit pas se plier à un Tetris humain parfaitement imbriqué, leurs homologues pourvus d’une patine plus commerciale, et donc a priori plus consensuelle, sont parfois capables de pieds de nez durables aux schémas préétablis. C’est ici le cas, quand il s’agit de s’emparer d’un enjeu aussi casse-gueule que celui de l’homoparentalité. Comme les autres cache un film qui passe son temps à prendre son titre flatteur à rebrousse-poil : certes Emmanuel (Lambert Wilson, gay délicat) fera tout pour avoir un enfant comme les hétéros, dans un désir qui le fait tendre vers une norme. Mais cette norme se verrait automatiquement contrariée par ce candidat à la paternité pas tout à fait comme les autres.
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Le film va-t-il s’établir sur une ligne de front homos vs hétéros ? Pas si simple, pour preuve cette réplique : “Deux homos qui élèvent un enfant, c’est pas normal, c’est contre nature !” Sortie de la bouche d’un hétéro, la réplique passerait pour réac. Prononcée par le boyfriend récalcitrant de l’intéressé (Pascal Elbé, gay ombrageux, acteur sexy pour la première fois), elle devient plus ambiguë. C’est le diagnostic important du film, montrer combien le discours de la norme hétéro a été assimilé par la minorité homo. Le duel est inégal, mais Emmanuel est rusé. Sa pugnacité fait feu de tout bois – une rencontre de hasard avec une jeune Argentine, son amitié avec le personnage d’Anne Brochet, géniale en vieille fille –, servie par une stratégie de l’esquive, du contournement agile des interdits, ou au contraire du passage en force.
Du coup, l’intrigue surprend par ses ricochets tout en souplesse, son afflux agréable de rebondissements, empreints parfois d’une certaine gravité. Au contact d’une telle détermination, certains se blessent. Comme si ce qui devrait être évalué est moins la prise de position pour ou contre la légitimité d’un désir
(le film a choisi son camp depuis longtemps, et nous avec), mais comment négocier avec ses éventuels dommages collatéraux.
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