Un biopic habile, qui épluche une à une les paillettes de Cloclo pour mettre à nu ses névroses.
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Je vous parle d’un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître. La France en ce temps-là applaudissait un chanteur, nommé Claude François, et ses chansons pour minettes.
Il s’épilait les sourcils et se décolorait les cheveux, portait des pattes d’eph et des chaussures à talon vernies, entouré de jeunes femmes toutes en longueur et dévêtues qui se déhanchaient à son propre rythme. C’était un homme d’affaires et un angoissé jouisseur…
D’évidence, Cloclo s’inscrit dans la lignée très à la mode du biopic patrimonial, du Gainsbourg (vie héroïque) de Joann Sfar au Coluche, l’histoire d’un mec d’Antoine de Caunes – on peut d’ailleurs s’amuser à effectuer des croisements entre les trois films (France Gall, Paul Lederman…).
Florent-Emilio Siri, son réalisateur, y vise avant tout la clarté du récit. Résultat : un film cohérent et obstiné, qui ne dévie jamais de sa route.
Claude François était un grand narcissique (blessé par le dédain affiché par son père à l’égard de ses velléités “artistiques”) et un obsessionnel de première classe et qui en est mort, à 39 ans, en voulant revisser une applique électrique alors qu’il prenait une douche dans sa baignoire.
Toute sa vie peut être mesurée à cette aune, et c’est ce que fait le scénario – tout son entourage était soumis à la pression de sa réussite personnelle. Le film le répète de bout en bout – bien qu’il ait été coproduit par ses deux fils.
Jérémie Renier y est génial : non seulement il ressemble physiquement à Claude François mais il parvient à l’incarner sans chercher à l’imiter bêtement (au contraire de ce que faisait Jamie Foxx pour Ray Charles dans Ray), tout en se gardant bien de la moindre distance avec son personnage.
Enfin Siri, mine de rien, réussit parfaitement, comme disent les commentateurs de tennis, les “coups importants”, ceux qui font gagner un match.
Ne citons que deux exemples : d’abord le long travelling en voiture qui suit sans coupure Claude François de son appartement à ses bureaux, vu de l’habitacle, et qui montre comme cela ne l’a jamais été auparavant ce que c’est que d’être une vedette adulée, suivie, attendue, chérie par les foules (féminines en l’occurrence), et d’y trouver son compte, un plaisir sans nom, parce qu’on aime fondamentalement cela.
Et enfin, la fameuse scène de la douche. Avec un art du suspense qu’il faut saluer, Siri parvient sans grands gestes de bras (et sans les fausses bonnes idées d’un Sfar dans Gainsbourg) à la “mettre en scène”.
De l’artisanat de qualité.
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