Canal+ Cinéma diffusera ce jeudi 21 février le documentaire inédit de Patrick Fabre « Cinéma au féminin Pluri(elles) ». Un témoignage-choral à la fois très bien documenté et intimiste, au fil duquel se déploie les rouages des inégalités à l’oeuvre dans l’industrie du cinéma. Canal+ Cinéma diffusera ce jeudi 21 février le documentaire inédit de Patrick Fabre « Cinéma au féminin Pluri(elles) ». Un témoignage-choral à la fois très bien documenté et intimiste, au fil duquel se déploient les rouages des inégalités à l’oeuvre dans l’industrie du cinéma.
L’image avait marqué les esprits et beaucoup circulé à travers le monde, jusqu’à devenir un véritable symbole de l’ère post-Weinstein. Agnès Varda et Cate Blanchett à la tête d’un cortège de 82 femmes issues de l’industrie du cinéma, montant fièrement les marches du 71e Festival de Cannes. 82, un effectif symbolique qui correspondait au nombre de films réalisés par des femmes et sélectionnés en compétition officielle depuis la première édition du festival. C’était il y a presque un an, et depuis, les choses ont-elles bougé ? Au-delà de la force de frappe de cette image, quel état des lieux du cinéma français, de la place qu’il accorde aux femmes, peut-on dresser? C’est ce que propose d’examiner le documentaire de Patrick Fabre, Cinéma au féminin Pluri(elles), qui revient avec minutie, chiffres et témoignages à l’appui, sur les mécanismes inégalitaires qui hantent le cinéma hexagonal. Tout en didactisme, sans étouffer sous la démonstration la spontanéité de ses témoignages, le film trouve un équilibre délicat entre distance et engagement. A découvrir sur Canal Plus Cinéma ce jeudi 21 février à 22h10.
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Un état des lieux implacable de la place des femmes dans l’industrie du cinéma
Le documentaire de Patrick Fabre prend pour toile de fond toute une série de mesures amorcées depuis un an pour combattre les déviances inégalitaires du cinéma français. On se souvient que Françoise Nyssen, ex-ministre de la Culture, avait à l’époque instauré des Assises sur la parité, l’égalité et la diversité dans le cinéma français, visant à encadrer les phénomènes de financement et d’accès aux postes dans l’audiovisuel. Initiées par le collectif 50/50 pour 2020 et le Centre national du cinéma et de l’image animé, ces assises avaient permis de mettre en place un bonus de 15% pour les productions respectant une parité hommes-femmes. Cette subvention supplémentaire visait à récompenser les équipes ayant donné au moins 8 postes importants à des femmes sur les tournages. Dans le sillage de cette mesure, Thierry Frémaux avait aussi signé une charte en faveur de la parité hommes-femmes dans les festivals.
A ces initiatives mises en place, le film confronte la réalité des chiffres, dressant un état des lieux implacable de la situation des femmes dans le champ professionnel cinématographique. Un chiffre en particulier retient l’attention : les réalisatrices représentent en France 23% seulement de la profession, un pourcentage qui, comme le note la réalisatrice Eva Husson (Bang Gang, Les Filles du soleil) dans le documentaire, « n’a quasiment pas bougé depuis 16 ans ». Une stagnation qui touche aussi les métiers techniques : 28% des femmes sont directrices de la photographie, 10% sont ingénieures du son. C’est dans le domaine du montage que ces dernières sont les plus présentes, puisqu’elles représentent 45% de la profession.
Comprendre les rouages d’un milieu inégalitaire
Au-delà de la qualité pédagogique du film, de la précision vertigineuse avec laquelle il constate froidement une certaine inertie de la situation, sa force réside dans sa capacité à proposer des pistes analytiques. Son credo consiste à ne pas s’en tenir aux chiffres, mais plutôt à s’en servir pour retracer les mécanismes qui ont permis d’aboutir à ces résultats. Construit comme une mosaïque de témoignages, le film laisse se déployer des paroles qui agissent comme autant d’indices pour comprendre les rouages d’une industrie inégalitaire, voire misogyne. Stéphanie Pillonca, réalisatrice de Fleur de Tonnerre, explique ainsi avoir été confrontée à des stéréotypes de genre : « On m’avait dit que mon film n’était pas un film de femmes. Est-ce que dans un film de femmes, une femme peut tuer? ».
De son côté, Catherine Corsini évoque aussi à travers une belle métaphore la difficulté pour une réalisatrice de s’imposer comme une figure pérenne dans le monde du cinéma: « Un femme on l’aime pour une première fois, on la déshabille, et après on la met au placard. J’ai eu le sentiment, souvent, de m’être excusée d’être un petit peu venue par effraction dans ce métier ». Des témoignages qui donnent à la narration polyphonique du film la force d’un discours collectif. Soucieux de mobiliser tous les outils (sociologiques, économiques, culturels, politiques) pouvant expliquer les rapports de force à l’oeuvre dans l’industrie du cinéma, le documentaire dépasse le simple constat chiffré pour former une constellation de récits engagés.
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