C’est sans surprise que « Timbuktu » d’Abderrahmane Sissako a dominé hier soir la 40e cérémonie des Césars, partageant un peu de son succès avec « Les Combattants » de Thomas Cailley.
Favori des pronostics, Timbuktu d’Abderrahmane Sissako a sans surprise dominé la 40e cérémonie des César, remportant les trophées du Meilleur Film, Meilleur Réalisateur, Meilleur Scénario original, Meilleure Musique, Meilleur Son et Meilleure Photographie. Sept récompenses donc, pour un film parti bredouille du dernier Festival de Cannes, mais ayant remporté un vif succès en salles. Un tel plébiscite, possiblement appuyé d’une victoire dimanche soir aux oscars dans la catégorie Meilleur Film étranger, devrait en toute logique renforcer ce triomphe commercial – pour mener peut-être le film vers le million d’entrées France.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Le succès de Timbuktu ne fut cependant pas sans partage. Cinq films parmi les sept nommés dans la catégorie reine du Meilleur Film ont également été récompensés. Le seul film nommé dans cette catégorie à repartir les mains vides fut donc Eastern boys de Robin Campillo, mais sa présence dans la compétition en dépit d’une carrière commerciale très modeste, pouvait constituer, en regard des critères des César, une victoire en soi.
A lire aussi : Les 12 moments les plus forts de l’histoire des César
L’autre grand vainqueur de la soirée fut donc le film enthousiasmant de Thomas Cailley, Les Combattants, trois fois lauréat dans les catégories de Meilleur Premier Film, Meilleur Espoir Masculin pour Kevin Azaïs et Meilleure Actrice pour Adèle Haenel. Laquelle recevait son second César, un an après celui du Meilleur Second Rôle féminin pour Suzanne, avec un naturel et une drôlerie feutrée irrésistibles. Derrière ces deux vainqueurs aux points, Timbuktu et Les Combattants donc, quatre autres films nommés en Meilleur Film obtenaient, oecuméniquement, un César chacun. L’outsider popu de la soirée, La Famille Bélier, s’est vu récompensé a minima pour sa jeune interprète Louane Emera, Meilleur Espoir féminin. Hippocrate, le succès-surprise de Thomas Lilti, a valu à Reda Kateb une victoire très méritée dans la catégorie du Meilleur Second Rôle masculin (même si sa présence dans cette catégorie plutôt que celle du Meilleur acteur était plus que contestable). Un seul César pour le superbe Sils Maria d’Olivier Assayas, ce n’était pas cher donné, mais la prestation fantasque de Kristen Stewart recevant avec un enthousiasme de débutante un César du Meilleur Second Rôle féminin assez décalé au vu de son statut de star internationale, était assurément un des moments les plus délectables de la soirée.
Enfin, le Saint Laurent de Bertrand Bonello a reçu lui aussi un César, celui des meilleurs costumes, ce qui ne manquait pas de piquant puisqu’il ne disposait pas contrairement au Yves Saint-Laurent de Jalil Lespert des vraies pièces du couturier. Cette récompense unique était néanmoins un peu désolante. Au vu des nominations, la profession semblait avoir choisi l’inventivité et la complexité du film de Bonello contre la platitude illustrative de celui de Jalil Lespert. L’obtention du César du Meilleur acteur pour le numéro d’automate mimétique de Pierre Niney plutôt qu’à l’interprétation inspirée de Gaspard Ulliel a inversé la vapeur. Le lauréat a néanmoins eu l’élégance de saluer de façon délicate et habitée son concurrent pour le même rôle.
En dépit de discours de remerciement d’une longueur record (largement raillée sur Twitter), la soirée, portée avec beaucoup d’allant par Edouard Baer, était par ailleurs assez réussie. L’hommage à Alain Resnais, grâce à Pierre Arditi, Sandrine Kiberlain, Lambert Wilson et, en contrechamps, Sabine Azema, était émouvant – même si on pouvait s’étonner qu’On connait la chanson soit le seul film montré en extraits : Hiroshima mon amour et L’Année dernière à Marienbad souffraient il est vrai de ne pas comporter de tubes de variété française.
La plupart des nommés (de Marion Cotillard à Juliette Binoche – à l’exception notable de la rebelle Catherine Deneuve) étaient présents dans la salle. De quoi accréditer les déclarations rassembleuses et un rien démagogiques de Danny Boon dans son discours inaugural : des films d’auteurs pointus aux grands succès populaires, le cinéma français n’est qu’un même tissu au maillage serré et ce sont les mêmes personnes qui, au coude à coude, font tous ces films si différents. On attend donc désormais de voir Danny Boon dans les prochains films de Robin Campillo, Céline Sciamma ou Abderrhamane Sissako.
{"type":"Banniere-Basse"}