Depuis des mois, les choix de la commission chargée d’interdire les films à certains publics soulève la controverse. Le cas de la sensation ultraviolente du dernier festival de Cannes vient d’être révisé.
Le film d’horreur Martyrs, présenté il y a quelques semaines à Cannes et sous la menace d’une interdiction aux moins de 18 ans, a écopé finalement d’une interdiction aux moins de 16 ans assorti d’un avertissement. Les professionnels de l’industrie du cinéma ne cessent néanmoins de réclamer une évolution de la Commission de classification des films.
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Rappel des faits : le 29 mai, la Commission de classification des œuvres cinématographiques demande que le film d’horreur franco-canadien Martyrs, histoire de vengeance volontairement dérangeante, soit interdit aux moins de 18 ans. Cette classification, très peu utilisée, provoque immédiatement une levée de bouclier des professionnels du cinéma, à la tête de laquelle Pascal Laugier, le réalisateur du film, dénonce une nouvelle forme de censure. Devant la contestation, la ministre de la culture Christine Albanel, en charge de la décision finale, demande à ce que la Commission se penche à nouveau sur le film. Mercredi 2 juillet, au terme d’une nouvelle séance, le film hérite finalement une classique interdiction aux moins de 16 ans, accompagnée d’un avertissement.
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Martyrs (2008)
En 2001, l’affaire Baise-moi avait déjà mis à mal les décisions de la Commission. Souhaitant interdire le film aux mineurs, la Commission avait pour seule solution de le classer comme pornographique, le faisant ainsi sortir des circuits de distribution habituels. Suite aux réclamations des deux réalisatrices, Virginie Despentes et Coralie Trin Thi, un décret avait rétabli une interdiction aux moins de 18 ans dissociée du classement X. Elle a depuis été utilisée à deux reprises, pour le classique japonais Quand l’embryon part braconner de Kôji Wakamatsu et pour le film d’horreur Saw 3 de Darren Lynn Bousman.
Dans les faits, l’interdiction aux moins de 18 ans, souvent ressentie comme une forme de censure par les réalisateurs, signifie souvent la mort économique du film: la plupart des grands circuits de diffusion, style UGC, ont renoncé a diffuser les films accompagnés de cette interdiction, les moyens à mettre en place étant difficile à réunir (vérification des cartes d’identité, vigiles à l’entrée des salles). Même problème pour ce qui est des droits télé, puisque même si il n’est pas considéré comme pornographique, le film ne bénéficie plus que d’une fenêtre de diffusion très réduite, à savoir entre deux et cinq heures du matin.
L’affaire Martyrs a priori terminée, le monde du cinéma souhaite désormais que les choses évoluent. La Société des réalisateurs de films, l’Union des Journalistes de Cinéma, la Société civile des Auteurs Réalisateurs Producteurs, le Syndicat français de la critique de cinéma et le Syndicat des producteurs indépendants ont conjointement demandé une concertation autour de la Commission des œuvres cinématographiques. D’après eux, la composition de la Commission (sur les 28 membres nommés, 9 seulement sont des professionnels du cinéma) la rend inapte à juger des enjeux d’une œuvre cinématographique.
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Martyrs (2008)
Initialement prévu pour le 3 septembre 2008, Martyrs sortira finalement le 3 septembre 2008. Présenté au marché du film lors du dernier Festival de Cannes, le film y avait rencontré un très vif succès et avait été acheté pour une sortie dans une trentaine de pays.
Suite à l’affaire Martyrs, un ensemble de 60 professionnels du cinéma, à l’initiative de Franck Ribière (producteur et distributeur à La Fabrique de Films) et du réalisateur Xavier Gens, ont créé le Club du Vendredi 13, afin de défendre et de développer le cinéma de genre en France. Plus d’information sur leur site officiel : http://www.leclubduvendredi13.com.
Nicolas Sykas
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