Catherine Breillat frappe fort avec son “Été dernier”, l’histoire d’amour interdite entre une avocate et son beau-fils de 17 ans.
On l’aura longtemps attendue la grande secousse de ce Festival. Plus qu’un choc, L’Été dernier, le quatorzième film de Catherine Breillat (et son premier depuis Abus de faiblesse en 2013), a mis le Festival dans un état de frémissement. On croyait être entré dans l’habituel torpeur caractéristique des derniers jours. Le film nous en a sorti pour deux raisons. D’une part, aucun film vu cette année ne flirte avec un tel éclat de mise en scène sur la crête des intensités esthétiques, sentimentales et sexuelles. D’autre part, il suscite des débats très engagés parmi les festivalier·ères, sur le caractère supposément problématique de l’œuvre et/ou de son autrice.
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Récit de la subite passion sexuelle entre Anne (Léa Drucker dans son meilleur rôle ever), une avocate spécialisée en droit de l’enfance, avec Théo, le fils de son mari âgé de 17 ans (Samuel Kircher, version plus dark et androgyne de Paul), L’Été dernier est un film court (1h44), dense, précis et troublant. Emporté par la danse endiablée des riffs de guitares de Dirty Boots de Sonic Youth, le film n’a pas peur d’aller marcher là où ça pourrait être sale : l’écart d’âge, l’érotisme qui se dégage d’un corps que d’aucun jugeront trop vieux ou trop jeune, la manipulation, le mensonge, la toxicité qu’une femme exerce sur son beau-fils et son mari… Breillat filme tout cela avec une rigueur morale impressionnante.
Dire
Toutes les scènes de sexe sont d’une amplitude folle dans ce qu’elles révèlent de la façon dont deux corps se parlent en faisant l’amour. Rarement un·e cinéaste ne sera aussi bien parvenu·e à filmer la puissance érotique des soupirs qu’échangent deux amant·es se laissant pénétrer par leur désir. L’Été dernier est un film souffle, plus qu’un film-mot, c’est même un film qui se méfie des mots, qui se défie de la parole. En plus de la scène finale où le mari intime à son épouse de garder ses aveux pour elle, il y a cette scène sublime où les deux amant·es se disent des horreurs alors qu’il et elle ont les yeux noyés de larmes. Les fluides trahissent ce que les mots tentent de dissimuler. Ce serait un terrible raccourci que de dire que Breillat fait ainsi l’apologie du silence. La première scène du film dit clairement les endroits où les mots sont indispensables. Il s’agit plutôt d’un film amoureux et attentif à d’autres formes de langage que la parole, et qui parle mieux la langue du cinéma, que tout autre film vu cette année.
L’Été dernier de Catherine Breillat est présenté en sélection officielle
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