Le Roumain Cristian Mungiu, réalisateur de “4 mois, 3 semaines, 2 jours”, Palme d’Or en 2007, n’avait pas réalisé de film depuis “Baccalauréat” en 2016. Il revient à Cannes avec R.M.N sur une petite communauté de Transylvanie
R.M.N ne sont pas que les trois consonnes du mot Roumanie, les trois lettres signifient aussi “imagerie par résonance magnétique”, une technologie utilisée en médecine, le fameux… IRM en français.
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L’action de R.M.N. se déroule dans un petit village perdu dans les bois de Transylvanie (la région de Dracula, oui…), une forêt infestée de loups et d’ours, métonymie de la Roumanie actuelle. Ici, deux communautés cohabitent : l’une roumaine, et l’autre, minoritaire, hongroise. On apprend rapidement que “les gitans” ont été virés du village, sans que l’on sache trop comment (et en a-t-on envie ?)… Ce qui est sûr, c’est que le ressentiment à l’égard de “l’Ouest” riche, arrogant, et de tout ce qui vient de “l’Est” (les étrangers, les gens racisés) est extrêmement violent et sans doute ancestral. Comme on le découvrira, la haine de l’étranger est équivalente aux humiliations subies par les habitant·es du village, qui sont contraint·es de partir travailler à l’ouest et dans des conditions déplorables pour survivre. On est toujours le pauvre, l’étranger, l’intrus d’un autre.
Tout ceci apparaît petit à petit au fil du récit, qui part a priori du retour de Matthias au village, après un séjour professionnel en Allemagne qui s’est terminé brusquement par un coup de boule à un contremaître. Boucher-dépeceur d’ovins dans une boucherie industrielle, Matthias est un être à la fois violent (notamment avec la mère de son fils) et fragile, adepte des armes, des valeurs viriles, mais aussi homophobe. Avec ses petits yeux enfoncés il fait peur, mais il attire aussi depuis toujours la seule personne qui ait vraiment réussi dans le village : Csilla, devenue la patronne d’une boulangerie, seule véritable entreprise de la région.
Racisme, communautarisme et nature vengeresse
Noël approche. Après quelques signes avant-coureurs d’une catastrophe (un enfant qui ne parle plus parce qu’il a eu une vision terrifiante dans un bois, la maladie du père de Matthias, figure emblématique et charismatique du village et des moutons qui disparaissent), l’arrivée de trois ouvriers sri-lankais dans l’usine (qui va lui permettre de recevoir des subsides de l’Union européenne) va déclencher un scandale, et faire remonter toute la haine raciste de la plupart des habitant·es du village.
Mungiu dirige tous ces différents fils narratifs, et surtout un nombre impressionnant de personnages (dont même un Français, observateur de la vie des ours dans la région) de main de maître. Il avance prudemment ses pièces, les mélange parfois (des scènes de discussions âpres de citoyen·nes en colère avec une scène très inconfortable de séduction), pour aboutir à une explosion finale totalement inattendue, allégorie (un peu lourdingue, avouons-le) de la nature qui va se venger des folies humaines.
R.M.N. de Cristian Mungiu avec Marin Grigore, Judith State, Macrina Bârlădeanu…
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