Le réalisateur de “La Loi de Téhéran” finit par lasser avec ce troisième long-métrage surexplicatif.
La Loi de Téhéran, le précédent et deuxième film du jeune cinéaste iranien Saeed Roustaee (son premier n’est jamais sorti en France), polar speedé dans une Iran envahie par le commerce de drogues mené tambour battant par un commissaire infatigable et sévèrement burné, avait fait sensation et cartonné auprès du public.
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Présenté en compétition, Leila et ses frères est d’un tout autre acabit. Le film dresse le portrait d’un vieil homme peu fortuné, peu apprécié, Esmail, qui se rend à la cérémonie de fin d’obsèques du patriarche de la famille (les hommes cessent ce jour-là de laisser pousser leur barbe et de porter une chemise noire). Esmail, mine de rien, réclame de succéder au titre si envié de parrain, auquel il a, par l’âge, le droit. Mais comment fera-t-il, lui qui n’a pas réussi sa vie, pour arroser toute la communauté, comme le nécessite ce statut ?
La vérité, c’est qu’Esmail a bien plus d’argent qu’il ne le montre. Y compris à son épouse, à ses quatre fils (tous sans emploi ou en situation précaire, en cette période de crise économique terrible que traverse l’Iran) et à sa fille, la belle et intransigeante Leila, qui vont aller de surprise en surprise, alors que cette dernière a eu une idée qui a enthousiasmé ses frères : qu’ils se cotisent pour louer un fond de commerce bien placé et y travailler tous ensemble. Or il manque une partie de l’argent nécessaire, et Esmail est bien décidé à le dépenser pour son “couronnement” au sommet de sa communauté.
Des discussions qui alourdissent le récit
D’où des discussions, des disputes, des explications très longues et violentes, des surexplications encore plus longues (chaque personnage semble avoir le droit de s’exprimer, même s’il dit la même chose que les autres, mais de son propre point de vue) qui alourdissent le récit, comme s’il était nécessaire de tout expliquer au spectateur qui n’est quand même pas complètement idiot.
On sent bien que, formellement (de longs travellings lents), Saeed Roustaee, qui n’a que 32 ans, a voulu “passer à la vitesse supérieure”, comme on dit, sortir du film de genre très codifié de La Loi de Téhéran, pour aborder un grand récit familial et moral (à la Asghar Farhadi, son illustre compatriote) et dénoncer les abus d’un patriarcat arbitraire, égoïste, prêt à sacrifier sa descendance sur l’autel de la vanité, mais déjà en voie d’extinction. Sans doute voulait-il donner une dimension épique à son film, creuser les déchirement d’une famille en ressassant les mêmes douleurs. Mais, forçant son talent et ses capacités actuelles de cinéaste, il n’y parvient jamais vraiment, et finit par lasser. Dommage.
Leila et ses frères, de Saeed Roustaee, avec Taraneh Alidoosti, Navid Mohammadzadeh et Payman Maadi, présenté en compétition, au cinéma le 24 août 2022.
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