Le film de Wim Wenders, tout à la gloire de l’actuel pape, est superficiel et maladroit .
Wim Wenders avait réalisé un documentaire sur le photographe brésilien Sebastião Salgado, sur la chorégraphe et danseuse Pina Bausch. Cette fois-ci, apparemment à la demande du Vatican, le voici portraitiste officiel du pape François, premier pape sud-américain, premier pape jésuite, premier jésuite à se prendre pour un franciscain. Sans doute pas le pire pape que le monde ait connu ni le plus antipathique…
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Un pape social et ouvert, mais jamais poussé dans ses retranchements
A vrai dire, rien de révolutionnaire dans la forme du film : des entretiens en tête-à-tête avec Jorge Mario Bergoglio (le vrai nom du pape), entrecoupés d’images de son élection, de ses voyages, des ses rencontres dans le monde entier avec les pauvres et les démunis comme avec les plus grands de ce monde. Dans ces images, rien ne le distingue vraiment d’un chef d’Etat, sinon son attention toute particulière, son écoute très concentrée de ceux qui souffrent (il en appelle plusieurs fois à l’écoute des autres). Mais il est pape, c’est un peu son métier (« C’est plus ça que je dis », comme disaient les Deschiens).
Ensuite, oui, dans ces entretiens, il ne fait que confirmer ce qu’il a dit plusieurs fois : il est un pape social et plutôt avancé sur certaines questions. Il réaffirme à plusieurs reprises qu’un catholique ne peut pas avoir deux dieux, Dieu et l’argent. Que le libéralisme détruit la Terre et les hommes (François d’Assise étant considéré aujourd’hui comme la figure catholique la plus écologiste qui soit). Qu’il n’a pas à juger les homosexuels. Il en appelle à une Eglise pauvre au service des pauvres (toujours Françoise d’Assise), etc. On ne peut pas dire non plus que Wenders le pousse dans ses retranchements. Rien sur l’euthanasie, par exemple (le pape François a encore précisé il y a peu que c’était Dieu qui doit décider du moment où un humain doit mourir…).
Pape parfait, film superficiel
Le film montre un homme qui réfléchit, dont on sent bien, parfois, qu’il n’en pense pas moins, notamment lors de sa rencontre avec l’autoritaire président turc Erdogan, où il arbore un sourire très ironique. La chambre des Représentants américains pleure et lui fait une standing ovation quand le pape en appelle à la charité, à la fin de l’exploitation de l’homme par l’homme et à l’accueil de l’étranger. Mais on se demande ce que le pape pense de ces larmes (de crocodiles, bien que très blanches), et on ne le saura pas. Le film ne creuse rien, et tourne donc très vite à l’hagiographie superficielle, puisque le pape est parfait. Mais quel est son pouvoir véritable, se demande-t-on ?
Et le cinéma, là-dedans ? A part quelques gros plans sur le visage convaincu et convaincant du pape quand il s’exprime sur les injustices de ce monde et leur caractère inadmissible, Wenders ne se fatigue pas trop. Et quand il tente quelque chose, il se plante complètement : les mises en scènes sulpiciennes, en muet en noir et blanc, des épisodes les plus marquants de la légende de François d’Assise, sont d’un ridicule achevé. Qu’en retient-on à la fin ? Qu’il a le sens de l’humour et de la communication. Cool.
Le Pape François – un homme de parole, documentaire de Wim Wenders (Italie/Suisse/France/Allemagne, 2018, 1h36)
Sélection : Hors-compétition
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