Il fait trop chaud, alors autant s’enfermer (chez soi ou dans une salle de cinéma) pour voir quelques films qui savent procurer un petit frisson glacial.
En ces temps de canicule, il faut adopter les bons gestes. Mais quitte à boire de l’eau en restant au frais, autant le faire en regardant quelques films qui eux aussi, savent donner un petit coup de frais. Voici notre sélection.
1. Un jour sans fin (Harold Ramis, 1993)
Quand Bill Murray revit le même jour en boucle, ce n’est pas sur une île paradisiaque, mais bien à Punxsutawney, dans le fin fond de la Pennsylvanie. C’est même une tempête de neige qui l’oblige à passer une nuit sur place, avant d’être piégé par cette ville. Heureusement, le froid devient vite un élément aussi magique que fédérateur, comme dans une version attendrie des contes de Noël de Dickens. Harold Ramis pioche également chez Capra, notamment dans sa manière d’utiliser la neige pour signifier la beauté d’un monde qu’il ne faut pas oublier. Et puis, il y a cette scène de sculpture sur glace absolument magnifique, qui confirme qu’Un jour sans fin est un film idéal en période de canicule !
2. La Ruée vers l’or (Charlie Chaplin, 1925)
Avec ses décors en studio incroyables, Charlie Chaplin a su nous faire ressentir les vents glaciaux des montagnes canadiennes. C’est l’un des éléments qui font de La Ruée vers l’or un chef-d’œuvre indispensable sur la fondation de l’Amérique, mettant en scène des hommes tentant de se faire une place dans un monde hostile. Les corps luttent contre le froid et la faim, et même si ce n’est pas toujours drôle pour eux, on entrerait bien quelques secondes dans l’écran pour profiter de ces environnements sublimes.
https://www.youtube.com/watch?v=f8v79UCDq6I
3. The Thing (John Carpenter, 1982)
Si le chef-d’œuvre de John Carpenter est d’un nihilisme glacial, c’est en partie grâce à la manière dont il filme l’Antarctique. Cette page blanche imprimée sur pellicule ne peut accueillir qu’une petite base de scientifiques, tel l’ultime îlot d’une humanité qui sombre vers l’Apocalypse. Alors que ces terres semblent stériles, elles parviennent à recracher de la vie, sous la (les ?) forme(s) d’un extraterrestre longtemps resté enfoui sous la glace.
Pas de doute, The Thing est un film qui rafraîchit, notamment par sa façon de mettre en avant une neige qui envahit chaque coin de plan, ou même par la buée émise à chaque respiration par les personnages, indice que certains pensent essentiel pour décrypter la fin ouverte du long-métrage, et savoir si l’un des derniers survivants est infecté par le monstre…
4. Titanic (James Cameron, 1997)
Titanic associe d’emblée la couleur bleue au froid et à la mort. Alors que des fausses images d’archive en sépia captent les adieux des passagers au départ de Southampton, un fondu enchaîné les plonge dans les eaux glacées de l’Atlantique, préfigurant leur mort prochaine. Mais pour que Rose, une fois âgée, puisse raconter son histoire, il lui faut survivre au froid. C’est pourquoi on lui remettra un manteau lors du naufrage et qu’elle flottera, seule, sur la pièce de boiserie une fois que le navire aura sombré. La lutte contre le froid se double ainsi d’une lutte pour la survie à un événement tragique.
5. Happy Feet (George Miller, 2006)
Avant de retourner dans le désert brûlant de Mad Max, George Miller est allé du côté de l’Antarctique, pour suivre un manchot qui fait des claquettes. Techniquement bluffant, Happy Feet est un pur bijou d’animation, parvenant à faire ressentir la texture de la neige et de la glace dans un film rempli de visuels absolument sublimes.
George Miller en profite pour réadapter, comme pour son Guerrier de la route, le monomythe campbellien. Son héros se voit ainsi plongé dans un voyage héroïque d’une puissance rare, combattant le froid polaire autant qu’il combat le destin tout tracé qu’on lui impose. Happy Feet est bien plus que la fable écolo à laquelle on l’a souvent réduit. Il nous renvoie à la beauté du monde qui nous porte, et aux sensations (parfois extrêmes) qu’il nous offre.
6. Dersou Ouzala (Akira Kurosawa, 1975)
C’est l’une des plus belles scènes tournées par le maître japonais : Arseniev, un cartographe russe et Dersou, un vieux chasseur mongol, se perdent dans les paysages désertiques de la Toundra. Le chasseur comprend qu’une nuit glaciale s’annonce et qu’ils n’y survivront pas. Les deux hommes vont alors couper les hautes herbes qui les entourent afin de se mettre à l’abri du froid. Mais à mesure que le blizzard se lève, le militaire semble de plus en plus désorienté et tombe de fatigue. Il est sauvé in extremis de la tempête de neige par le petit homme. Le froid peut être mortel pour celui qui n’a pas une connaissance intime du territoire.
https://www.youtube.com/watch?v=R13e2ZrU8Vc
7. Le Territoire des loups (Joe Carnahan, 2012)
Sorti dans la mouvance de la saga Taken, Le Territoire des loups a vite été relégué comme un énième film d’action avec Liam Nesson, alors qu’il est bien plus que cela. Le génial et sous-estimé Joe Carnahan marche très clairement dans les pas de John McTiernan (et surtout de son Predator) et délivre un survival tendu, où un crash d’avion laisse ses (anti-) héros perdus dans la nature sauvage. La neige a rarement paru si hostile, magnifiée par un cinéaste qui l’emploie comme outil de réflexion sur la condition humaine au travers d’une mise en scène brillamment signifiante. A (re) découvrir d’urgence !
8. Jeremiah Johnson (Sydney Pollack, 1972)
Dans les années 1850, un soldat décide de fuir la civilisation dans les Rocheuses. Tel un anti-western, Jeremiah Johnson dépeint une histoire de l’Amérique tragique, qui a autant sacrifié des peuples que leurs coutumes. Le film possède ainsi une sorte d’aspect fantomatique renforcé par ses décors enneigés, tandis que son protagoniste (incarné par Robert Redford) cultive le savoir des Indiens pour survivre. Là encore, le froid est défié de manière collective, par des connaissances partagées, renvoyant à un humanisme que la fin émouvante du long-métrage sublime.
9. Fargo (Joel et Ethan Coen, 1996)
De tous les films des frères Coen, Fargo est peut-être, avec Inside Lewyn Davis, celui qui procure le plus de frissons, dans les deux sens du terme. C’est un thriller inspiré d’un faux fait divers improbable (un homme paye deux malfrats pour simuler l’enlèvement de sa femme afin de toucher la rançon de son beau-père) qui se déroule dans un coin paumé du Mid West, entre le Dakota du Sud et le Minnesota, là où les hivers sont rudes. Un film fait de paysages désertiques, cadrés comme dans un western désenchanté, avec la neige comme seul horizon ; de quoi prendre un bain de fraîcheur.
10. Yves (Benoît Forgeard, 2019)
En ces temps de canicule, quoi de mieux que d’avoir en meilleur ami un frigo intelligent ? C’est le postulat réjouissant d’Yves, chronique d’anticipation où le HAL 9000 de notre temps a la capacité de garder nos bières au frais. Mieux encore, il aide le protagoniste, jeune rappeur raté, à composer un tube, et à trouver l’amour, au point d’amener une relation à trois entre humains et machine, qui se termine dans le bac à glaçons. Autant dire que Benoît Forgeard n’est pas seulement à la page en ce qui concerne l’intelligence artificielle, dans cette comédie décalée et généreuse.
Bonus : Knick-Knack (John Lasseter, 1989)
Pour finir, comment ne pas s’attarder sur l’un des courts-métrages du studio Pixar, quand celui-ci adopte le point de vue d’un bonhomme de neige cherchant à sortir de sa boule en verre ? En quelques minutes, John Lasseter et ses équipes amènent l’animation en 3D (à l’époque très expérimentale) dans le domaine du burlesque. Fun et coloré, Knick-Knack est un film qui n’est pas seulement rafraîchissant grâce à son protagoniste.
https://www.youtube.com/watch?v=SfwVtiOyIfw